QUEL AVENIR POUR l’album ?
Les ventes de disques audionumériques diminuent d’année en année
Pierre Lapointe avait offert aux spectateurs de rester sur place, après son concert au Grand Théâtre de Québec, la semaine dernière, pour une séance de questions-réponses. Mais avant d’entamer la discussion, il avait un message à passer.
« Les Spotify, les iTunes et les YouTube de ce monde ne nous donnent pas de retour sur notre argent, alors qu’ils exploitent notre matériel. C’est du vol », a-t-il lancé à ses fans.
Lapointe a alors dévoilé certains chiffres qui, il faut l’avouer, sont consternants. La science du coeur, son plus récent album unanimement salué par les critiques, a été élu meilleur vendeur la semaine de sa sortie au Canada.
Combien d’exemplaires vendus ça représente ? 5600. Des broutilles si on compare aux scores des meilleurs vendeurs d’il y a trois ou quatre ans à peine.
Imaginez les ventes des autres albums parus le même jour.
Autre exemple évoqué par Lapointe : sa chanson Je déteste ma vie a franchi le cap du million d’écoutes sur Spotify. En retour, il a reçu un chèque de 600 $.
Il ne considérait pas que c’était bien payé, ai-je besoin de vous le dire.
TAYLOR ET MARIO
Le problème, c’est qu’on ne remettra pas le dentifrice dans le tube. Il va falloir composer avec les sites d’écoute en continu et personne ne détient la recette miracle pour un meilleur mode de rétribution des artistes.
Il y a des tentatives, cela dit. Taylor Swift a banni son dernier album, Reputation, des sites d’écoute durant la semaine suivant sa parution. Avec pour résultat qu’elle a battu le record de ventes d’Ed Sheeran pour l’année 2017.
Mais c’est Taylor Swift. Qui d’autre peut se permettre ça ?
Au Québec, Mario Pelchat refuse obstinément de rendre disponibles sur Spotify ses plus récents albums (ceux dont il détient les droits). Ses deux albums lancés cette année, en association avec un collectif de prêtres, trônent au sommet des ventes. Noël Ensemble a été certifié disque d’or, hier, pour 40 000 exemplaires vendus.
Sauf que les fans de Pelchat et le public qui écoute des chants liturgiques sont âgés. Ils achètent encore des albums physiques et fréquentent peu Spotify.
RETOUR EN ARRIÈRE
L’avenir passe peut-être par un… retour en arrière. Selon l’influent analyste de l’industrie musicale et blogueur Bob Lefsetz, l’idée même d’un album s’avère non pertinente sur le web. Du coup, argue-t-il, c’en est fait des ventes d’albums.
Il prône plutôt la publication de chansons à la pièce, comme ça se faisait à l’époque des 45 tours.
Ce qui compte, dit-il, c’est l’oeuvre, le répertoire. « Quand j’entends une chanson que j’aime, je vais sur Spotify et je regarde quelles sont les autres chansons les plus écoutées. Je m’en fous qu’elles viennent du même album ou non. »
L’album serait-il donc une espèce en voie de disparition ? Malgré la renaissance du marché du vinyle ? Dans une industrie qui vivote comme celle de la musique, rien n’est à exclure.