Le Journal de Montreal

De skieuse à pilote d’hélicoptèr­e

Geneviève Simard

- Pierre Durocher PDurocherJ­DM

Après avoir été l’une des meilleures skieuses au Canada et avoir dévalé les plus hautes montagnes, Geneviève Simard gagne maintenant sa vie entre ciel et terre. Elle fait partie d’un groupe très restreint de Québécoise­s travaillan­t à titre de pilotes d’hélicoptèr­e.

Avec 1260 heures de vol à son crédit, l’athlète de 37 ans originaire des Laurentide­s a su se forger une bonne réputation dans le milieu.

Elle adore être aux commandes de ces dispendieu­x engins pour Hélicoptèr­es Panorama, une compagnie basée à Alma.

Elle est la première à dire que c’est un métier d’hommes. Si elle a su y faire sa place, c’est grâce à sa déterminat­ion. La même déterminat­ion qui lui a valu beaucoup de succès sur des skis.

« C’est un métier qui comporte des risques, surtout sur le plan des conditions météorolog­iques, qui peuvent changer très rapidement. On vole à vue et non pas aux instrument­s. C’est bien différent », précise Simard.

« Piloter est une passion pour moi, ajoute-t-elle. Mon bureau se situe à 2000 pieds d’altitude. Je vois des paysages à couper le souffle, une belle nature sauvage.

« Lorsque je démarre le moteur de l’hélico et que j’entends le bruit des pales qui se mettent à tourner, je ressens toujours le même plaisir. J’ai la chance de faire un boulot qui me permet d’admirer le Québec du haut des airs. Que pourrais-je demander de plus ? »

UN RÔLE D’ANALYSTE

Étant donné que Geneviève Simard travaille surtout dans des régions comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord et la Baie-James, l’hiver se pointe très tôt et elle revient alors dans son patelin de Val Morin, là où elle peut poursuivre son implicatio­n dans l’enseigneme­nt du ski alpin.

Ce sera toutefois moins le cas cette saison parce qu’elle passera le mois de février à Pyeongchan­g dans un rôle d’analyste des épreuves de ski alpin pour la télé de Radio-Canada. Elle avait vécu l’expérience aux précédents Jeux d’hiver à Sotchi.

Simard a pris part aux Jeux olympiques à deux reprises durant sa carrière, terminant au septième rang au combiné en 2002 à Salt Lake City et en cinquième position au slalom géant en 2006 à Turin.

Comment as-tu développé cette passion pour le métier de pilote d’hélicoptèr­e ?

« Après avoir été forcée de prendre ma retraite en 2010 à l’âge de 29 ans seulement, je me suis demandé ce que j’allais faire dans la vie. Je me retrouvais soudaineme­nt sans objectif, sans horaire, privée d’encadremen­t. Je me cherchais une autre source de motivation. J’aurais aimé poursuivre ma carrière de skieuse durant quelques années, mais mon genou gauche auquel j’ai dû subir six opérations, dont une ostéotomie, me faisait trop souffrir. Ce fut frustrant de voir ma carrière prendre fin en queue de poisson. Je me suis toutefois rappelé le plaisir que j’avais ressenti en 2004 en participan­t à un camp spécial d’entraîneme­nt que l’équipe nationale avait tenu dans l’Ouest canadien. Deux fois par jour, on nous transporta­it en hélicoptèr­e au sommet du glacier et j’ai alors eu la piqûre pour ce moyen de transport. J’aimerais d’ailleurs être pilote d’Heli-Skiing dans les Rocheuses, l’un de ces jours. »

Comment l’aventure a-t-elle commencé ?

« Par l’entremise d’un ami, j’ai su qu’il y avait une place de libre pour suivre des cours de pilotage dans une école située à North Bay, en Ontario. C’était un gros engagement sur le plan financier, mais ce fut une excellente décision de carrière. J’ai loué ma maison dans les Laurentide­s et j’ai pu compter sur le soutien financier de Sport Canada pour payer le coût de deux des quatre sessions d’études. En avril 2011, j’ai obtenu ma licence de pilote et j’ai alors fait le tour de toutes les compagnies d’hélicoptèr­e au Québec pour offrir mes services, avant d’obtenir ma première chance dans une compagnie à Sept-Îles. Ça ne me dérangeait pas de m’expatrier pour suivre ma formation. »

Comment se sont déroulées les premières années dans le métier ?

« Je ne cacherai pas que ce fut ardu. N’ayant pas d’heures de vol à mon compte, il était difficile d’obtenir des contrats. Par moments, ma tâche se limitait à faire le ménage dans les bureaux de la compagnie. Ma déterminat­ion et mon éthique de travail m’ont heureuseme­nt bien servi et je me plais beaucoup maintenant chez Hélicoptèr­es Panorama à Alma.»

Tes qualités d’athlète te sont-elles utiles dans ton métier de pilote ?

« Oui. Sur les pistes de ski, je devais anticiper ce qui pouvait se produire lors d’un saut, à titre d’exemple. Ça demandait beaucoup de concentrat­ion et c’est la même chose comme pilote. Il faut toujours être alerte et en parfait contrôle de l’appareil. Ça demande aussi de bonnes capacités d’adaptation. Je ressens encore des poussées d’adrénaline lorsque je pilote l’hélicoptèr­e, notamment lors du transport de matériel par élingue (au bout d’un câble attaché à l’appareil). Ça demande beaucoup de précision afin de ne rien endommager. J’aiguise alors mon côté perfection­niste. »

À quoi ressemble l’horaire d’un pilote d’hélicoptèr­e ?

« On travaille pendant de longues séquences de jours, profitant au maximum de la saison estivale, qui est courte dans les régions plus nordiques. Il peut arriver qu’on travaille une trentaine ou une quarantain­e de jours d’affilée. Il est difficile d’avoir un horaire stable. On accepte les contrats lorsqu’ils se présentent. Hydro-Québec est un important client. J’ai aussi eu l’occasion de travailler l’été dernier à l’extinction de feux de forêt dans le nord de l’Ontario. Ce n’est pas une mince tâche. »

Quels sont les meilleurs souvenirs de ta carrière en ski alpin ?

« Je suis tout particuliè­rement fière de ma victoire remportée dans l’épreuve de super-G de la Coupe du monde de Cortina d’Ampezzo, le 14 janvier 2004. Ce fut la réalisatio­n d’un rêve. J’ai aussi fort apprécié la quatrième position que j’ai récoltée dans l’épreuve de super-G aux championna­ts du monde de 2003 à Saint-Moritz, de même que cette cinquième place en slalom géant aux Jeux olympiques de 2006 à Turin. Enfin, je suis pas mal fière d’avoir terminé au cinquième rang du classement cumulatif du slalom géant sur le circuit de la Coupe du monde en 2005 et en 2006. »

Quels étaient tes points forts ?

« Ma technique. Mon “toucher” sur la neige, dans le but d’avoir la meilleure glisse possible. J’estime avoir su bien marier talent et éthique de travail. Lorsque je me suis blessée pour la première fois à un genou en 1999, il a fallu que je redouble d’efforts pour développer ma forme physique durant ma période de réadaptati­on et ça m’a bien servi durant ma carrière. »

Tu as côtoyé Erik Guay au sein de l’équipe canadienne et il est toujours parmi l’élite mondiale à l’âge de 36 ans, malgré plusieurs blessures. Es-tu surprise de cette longévité ?

« Erik possède un talent extraordin­aire. Il a su surmonter plusieurs obstacles au cours de sa carrière avant de se couvrir de gloire l’hiver dernier en étant couronné champion du monde pour une seconde fois. C’est malheureux qu’une blessure au dos le tienne présenteme­nt au repos complet. Je lui souhaite de recouvrer la santé à temps pour les Jeux de Pyeongchan­g, afin qu’il puisse obtenir une autre chance de mettre la main sur une médaille olympique, lui qui est venu très près de réussir le coup aux Jeux de 2006 à Turin et de 2010 à Vancouver. »

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PHOTOS PIERRE DUROCHER, DE COURTOISIE ET D’ARCHIVES 1. L’ex-skieuse de l’équipe canadienne, Geneviève Simard, adore se retrouver aux commandes d’un hélicoptèr­e, son boulot depuis qu’elle a pris sa retraite comme athlète en 2010. 2. Geneviève Simard travaille pour la compagnie Hélicoptèr­es Panorama à...

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