C’est Noël à l’année longue au parlement pour les d éputés
Exemples de cadeaux reçus depuis deux ans Plusieurs cadeaux sont envoyés aux élus fédéraux qui peuvent les garder s’ils valent moins de 1000 $
OTTAWA | De la montre donnée au ministre des Finances Bill Morneau au billet pour Céline Dion reçu par le ministre du Commerce international François-Philippe Champagne, les élus canadiens bombardés de cadeaux ont le droit d’en conserver beaucoup. Bien plus que leurs homologues américains.
Si le président de la Chambre des communes Geoff Reagan avait été un élu américain, il n'aurait peut-être pas pu garder le « violon à tête de cheval avec un étui rigide » reçu du président mongol Miyegombo Enkhbold en octobre dernier.
Et la ministre de la Santé Jane Philpot aurait peut-être dû se départir de la « couverture pour agenda en peau de phoque » offerte par la compagnie inuit Makivik en juillet 2016, si elle avait siégé à Washington au lieu d’Ottawa.
« Aux États-Unis, les cadeaux peuvent être acceptés, mais au-delà d’une valeur [de 390 $ US, soit près de 500 $], ils deviennent la propriété du pays. Si quelqu’un voulait offrir un cadeau pour le salon de l’ambassadeur, nous l’avertissions de donner quelque chose de pas cher », explique Sarah Goldfeder, ex-assistante de l’ambassadeur des États-Unis au Canada.
Les articles culturels, dit-elle, sont habituellement trop dispendieux pour être gardés par les élus ou les employés du gouvernement américain.
PLUS STRICTE
Même si, au Canada, la loi interdit aux élus fédéraux d’accepter les présents, il existe une exception pour « une marque de courtoisie ou de protocole », soit d’une organisation, d’une entreprise ou d’un gouvernement étrangers. Ils peuvent conserver les cadeaux de moins 1000 $.
« C’est plus encadré du côté des États-Unis, plusieurs lois encadrent tous les types de cadeaux pour les officiels du gouvernement », confirme Andréanne Bissonnette, chercheuse en résidence à l’Observatoire sur les États-Unis.
Ici, les cadeaux doivent être déclarés à la commissaire aux conflits d’intérêts et à l'éthique, Mary Dawson. Elle a recommandé pendant des années d’améliorer la transparence en abaissant le seuil de déclaration, qui est finalement passé de 500 $ à 200 $ en 2015.
APPARENCE
Cela n’est pas assez pour l’organisme Démocratie en surveillance, qui milite pour la fin de cette pratique.
« De recevoir des cadeaux sur la colline parlementaire encourage la culture des retours d’ascenseurs. Il devrait être interdit pour les élus d’accepter tout cadeau », croit Duff Conacher, son cofondateur.
Selon Michel Nadeau, de l’Institut sur la gouvernance, il est important de « contrer l’apparence d’abus », notamment en limitant le nombre maximal de cadeaux que peut recevoir un élu, ce qui n’est pas fait pour le moment.
« On devrait leur proposer d’en garder une vingtaine, et de donner tous les autres », suggère-t-il.
– Avec la collaboration d’Émilie Bergeron