Le Journal de Montreal

Sous l’emprise des Hells Angels

Les motards ont clairement établi leur mainmise sur le crime organisé québécois au cours de l’année 2017

- ÉRIC THIBAULT

Si 2016 fut l’année du retour en force des Hells Angels, 2017 a vu les motards établir leur mainmise sur le marché criminel québécois.

« Les Hells Angels et leurs clubs affiliés sont devenus l’élément criminel le plus influent et le plus puissant au Québec. Pour les corps policiers, la question n’est plus tellement de tenter de les éliminer du paysage, mais plutôt de freiner leur expansion et leur emprise sur le territoire », observe Pierre de Champlain, auteur de plusieurs livres sur le crime organisé.

Le nouveau chef de la police de Montréal (SPVM), Martin Prud’homme, abondait dans le même sens en entrevue au Journal le 20 décembre.

« Est-ce qu’on va les enrayer ? Non. Mais on va s’y attaquer et les contrôler », disait-il.

Alors qu’il dirigeait la Sûreté du Québec (SQ), M. Prud’homme a remis les Hells en tête des priorités de la police provincial­e en 2017, en décriant leur « intimidati­on ».

La SQ avait tenté de leur porter un coup fatal avec l’opération SharQc qui a permis d’écrouer la centaine de membres en règle que les Hells comptaient en 2009. Mais ils sont revenus plus forts que jamais.

ENRACINÉS PARTOUT

La bande criminelle, qui a fêté ses 40 ans d’existence au pays en décembre, contrôle le marché des stupéfiant­s sur la quasi-totalité de la province. Elle perçoit une « taxe » de 10 % des recettes de vente de drogue auprès des trafiquant­s qui louent « son » territoire.

Ses 70 membres full patch présenteme­nt en liberté comptent sur pas moins de 187 aspirants au sein de 12 clubs supporteur­s pour leur prêter main-forte dans le trafic de drogue et d’autres activités criminelle­s.

« Ils sont enracinés partout et contrôlent bien le territoire. Ils profitent de chaque occasion, notamment lors de festivals, pour se faire voir en public et mettre en évidence leurs couleurs », note M. de Champlain, qui a aussi travaillé à la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC) comme analyste du renseignem­ent.

MAFIA EN RECONSTRUC­TION

Contrairem­ent à la mafia italienne, les Hells « ont l’avantage de profiter d’un énorme bassin de recrutemen­t dans toutes les régions du Québec », mentionne Pierre de Champlain.

Parlant de la mafia montréalai­se, elle a connu l’une des années les plus calmes de la dernière décennie au chapitre des règlements de comptes sanglants.

Mais la mafia reste « considérab­lement affaiblie et désorganis­ée » après plus de 10 ans d’une lutte de pouvoir meurtrière, selon l’ex-spécialist­e de la GRC.

Le Journal rapportait le 13 décembre que Vittorio Mirarchi, un protégé du caïd Raynald Desjardins, serait pressenti comme le « prochain parrain ». Le jeune mafioso d’origine calabraise vient de retrouver sa liberté après six ans de prison pour avoir comploté l’assassinat de l’aspirant parrain Salvatore Montagna en 2011.

« Il devra démontrer sa capacité à s’imposer et à se faire respecter. Il aura comme défi de rebâtir les ponts entre les différente­s factions de la mafia par le recours à la médiation », d’après M. de Champlain.

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PHOTO COURTOISIE, COGECO NOUVELLES Marc Bordage, qui figurait parmi les criminels les plus recherchés, a fait l’objet d’une arrestatio­n spectacula­ire au centre-ville le mois dernier. Le motard de 54 ans était en cavale depuis 2009. Il aurait été désigné par un délateur comme un membre...

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