Le Journal de Montreal

VOICI LA LETTRE DE SUSPENSION DE HARDING QUI A ÉTÉ CACHÉE AU JURY

Tom Harding avait été suspendu en 2008 parce qu’il n’avait pas mis de freins à main sur un train

- CAROLINE LEPAGE Collaborat­ion spéciale

SHERBROOKE | Tom Harding avait déjà été suspendu pendant cinq jours en 2008 pour ne pas avoir mis de freins à main sur un convoi de 58 wagons, ce que le jury n’a jamais su lors de son procès.

Le 2 juillet 2008, Tom Harding et l’ingénieur avec qui il travaillai­t ont immobilisé 58 wagons sur une voie de liaison à Saint-Jean-sur-Richelieu. On apprend dans une lettre obtenue par Le Journal que Harding, qui agissait comme chef de train, n’avait mis aucun frein à main et pas suffisamme­nt de freins à air sur le convoi qui est allé percuter un autre train.

« Les conséquenc­es de cette collision auraient pu menacer votre sécurité, celle de votre ingénieur, d’un employé de Railpower technologi­es et des citoyens innocents de Saint-Jean », a notamment écrit John W. Schultz, qui était alors vice-président transport à la MMA.

La lettre comprenait plusieurs règlements de sécurité qui expliquaie­nt comment sécuriser un train et effectuer le test d’efficacité obligatoir­e.

CACHÉ AU JURY

La Couronne souhaitait déposer cette lettre et la suspension en preuve pour montrer au jury composé de huit hommes et quatre femmes que Tom Harding connaissai­t le règlement sur la sécurisati­on des trains, ce qu’il n’a jamais nié, même s’il ne l’a pas parfaiteme­nt respecté, le soir du 5 juillet 2013.

Cette lettre a été exclue de la preuve par le juge Gaétan Dumas. Il considérai­t qu’elle serait trop préjudicia­ble envers M. Harding, accusé de négligence criminelle causant la mort de 47 personnes. Il a expliqué au jury qu’il devait juger les actions de M. Harding le jour des événements.

Maintenant que le jury est séquestré, l’ordonnance de publicatio­n a été levée.

Harding a donc purgé cinq jours de suspension sans solde après ces événements et a été mis en probation pour un an. S’il ne sécurisait pas bien ses trains à nouveau, il purgerait cinq autres jours de suspension en plus de nouvelles sanctions, apprend-on dans la lettre.

Presque cinq ans jour pour jour après sa suspension, Tom Harding a à nouveau arrêté un train dans une pente, à Nantes. Cette fois, il avait mis assez de freins à air, mais pas suffisamme­nt de freins à main.

Après un incendie dans la locomotive de tête, le train a dévalé une côte avant de dérailler et d’exploser au centre-ville de Lac-Mégantic le 6 juillet 2013.

LE DIRECTEUR PAS CONTENT

Dans un échange de courriels du 15 juillet 2008 qui n’a pas été présenté au jury, M. Schultz a demandé à Jean Demaître, qui était directeur de l’exploitati­on de la MMA au Québec et également accusé de négligence criminelle causant 47 décès, de faire plus de vérificati­ons sur le terrain pour observer les employés. « Peut-être que tu pourrais alors prévenir un ou deux (accidents) d’arriver », a-t-il écrit.

« Je suis désolé que tu penses que ces incidents sont arrivés en raison d’une erreur de communicat­ion avec l’équipage et que je ne quitte pas assez nos bureaux de Farnham. [...] Je ne crois pas que ce sera le dernier incident à arriver au Canada », a répondu M. Demaître.

– En collaborat­ion avec David Prince

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PHOTOS D’ARCHIVES Tom Harding avait été ramené à l’ordre par ses supérieurs cinq ans avant l’explosion de Lac-Mégantic parce qu’il n’avait pas mis assez de freins à main et que le train était parti à la dérive. C’est exactement ce que la Couronne lui a reproché lors de...

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