Le Journal de Montreal

« L’immigrante parfaite » et sa famille en danger ?

Ils craignent pour leur sécurité depuis leur retour au Sri Lanka, où ils étaient menacés

- DOMINIQUE SCALI

Les membres de la famille de « l’immigrante parfaite » expulsés vers le Sri Lanka en décembre ont été interrogés pendant huit heures à leur arrivée au pays, craignent toujours pour leur vie et viennent d’apprendre qu’Ottawa n’interviend­ra pas pour permettre leur retour au Canada.

« On ne se sent pas en sécurité », avoue Leony Pavithra Lawrence, 22 ans. « Tout ce que nous voulons, ma soeur et moi, c’est revenir et étudier. »

Pour la première fois depuis leur expulsion, Le Journal a pu joindre la famille Lawrence au téléphone cette semaine.

Le Journal publiait en novembre le portrait de Leony Pavithra, qui s’est démarquée par sa persévéran­ce au point de gagner un prix de la Commission scolaire de Montréal (CSDM).

Considérés par plusieurs comme des immigrants-modèles, les Lawrence s’étaient intégrés au Canada pendant cinq ans. Ils ont été renvoyés le 3 décembre dernier au Sri Lanka, qu’ils avaient quitté parce qu’ils y étaient menacés de mort.

Les Lawrence ont appris mardi que le ministre de l’Immigratio­n Ahmed Hussen n’avait pas l’intention de leur accorder une autorisati­on pour revenir au Canada, malgré les nombreuses pressions faites par des politicien­s québécois (voir autre texte).

« On n’a plus trop d’espoir. Quand je pense à tous ceux qui se sont battus pour nous, soupire Leon Lawrence, le frère de Leony. On a vraiment cru que le gouverneme­nt fédéral ne nous [abandonner­ait] pas. »

DANGER

À leur arrivée le 4 décembre, les autorités les ont retenus à l’aéroport pendant huit heures. Ils y ont été interrogés par trois agences différente­s.

Depuis leur retour, les membres de la famille craignent trop pour leur sécurité pour retourner dans leur province d’origine, où ils seraient facilement repérables, explique Leon Lawrence. Ils restent donc pour l’instant dans une maison qu’ils louent à Colombo, la capitale du pays.

Ils ont passé le dernier à mois à attendre des nouvelles du ministre de l’Immigratio­n et à « régler des problèmes », relatent-ils. Par exemple, ils ont de la difficulté à faire boire la fille de Leon, âgée de cinq mois, le lait maternisé qu’on trouve au Sri Lanka n’étant pas le même qu’au Canada, illustre le père Robert Lawrence.

Étant donné le refus d’intervenir du ministre, la famille se rendra aujourd’hui à l’ambassade canadienne dans l’espoir d’obtenir un visa temporaire. « Mais ce n’est pas certain qu’ils vont nous l’accorder », estime M. Lawrence.

Advenant un refus, ils n’auraient probableme­nt pas d’autre choix que de retourner dans la province où leur vie a été menacée puisqu’il est très difficile de se trouver du travail dans la capitale, explique-t-il.

MEILLEUR ESPOIR POUR LEONY

« Malheureus­ement, les carottes sont pas mal cuites pour la famille », concède leur avocat Stéphane Handfield.

Les chances sont toutefois meilleures pour Leony Pavithra, puisqu’elle a un permis lui donnant le droit d’étudier au cégep Ahuntsic en tant qu’étudiante étrangère, explique-t-il.

La situation est aussi triste pour la cadette Dharusha, âgée de 17 ans, qui allait terminer son 5e secondaire en français dans quelques mois. « Je crains d’avoir déjà manqué beaucoup de cours [en raison de l’expulsion]. Je n’arrive même pas encore à croire que je suis au Sri Lanka », lâche-t-elle.

 ?? PHOTO COURTOISIE ?? Expulsées du Canada en décembre dernier, Leony Pavithra Lawrence (au centre) avec ses soeurs Venithra (à gauche) et Dharusha (à droite) sur une photo prise hier à Colombo, au Sri Lanka. En mortaise, Leony à Montréal avant son départ à la fin de...
PHOTO COURTOISIE Expulsées du Canada en décembre dernier, Leony Pavithra Lawrence (au centre) avec ses soeurs Venithra (à gauche) et Dharusha (à droite) sur une photo prise hier à Colombo, au Sri Lanka. En mortaise, Leony à Montréal avant son départ à la fin de...

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