Le Journal de Montreal

D’ex-étudiants de Concordia témoignent

Allégation­s d’inconduite sexuelle contre des profs

- DOMINIQUE SCALI

Baiser forcé, abus de pouvoir, relation malsaine avec une personne en autorité. Une jeune femme raconte son passage traumatisa­nt à l’Université Concordia, qui a dû ouvrir une enquête sur des allégation­s d’inconduite sexuelle pesant sur plusieurs de ses professeur­s.

« Ça a tué mon amour pour l’écriture de fiction », confie Rachel (nom fictif), 26 ans, qui a étudié à Concordia ces dernières années. Elle préfère taire son vrai nom par peur de représaill­es.

« J’en suis venue à avoir l’impression que dès qu’une personne est un écrivain ou un poète, c’est un prédateur et une mauvaise personne », dit-elle.

Elle fait partie des trois anciens étudiants de Concordia qui ont parlé au Journal hier pour corroborer les allégation­s d’inconduite sexuelle qui pèsent sur plusieurs professeur­s du programme de création littéraire et qui font l’objet d’une enquête de l’université depuis hier.

L’établissem­ent réagissait à un essai publié sur un blogue lundi par un écrivain qui décrit les relations de pouvoir malsaines entre des étudiantes et professeur­s qui avaient des relations sexuelles.

Rachel a elle même vécu une relation amoureuse « désastreus­e » et « intermitte­nte » pendant trois ans avec un employé de l’université qui avait des tâches académique­s et qui abusait de son pouvoir sur elle, relate-t-elle. « C’est lui qui décidait quand notre relation avait lieu ou pas », se souvient-elle.

Elle raconte aussi avoir subi les avances d’un professeur d’une autre université lors d’un événement organisé par Concordia. « Il m’a agressée et m’a embrassée de force devant une panoplie de professeur­s de Concordia qui, eux, n’ont rien fait. Il a tenté d’avoir une relation sexuelle avec moi. J’ai résisté et fui à la maison. »

Selon elle, ces inconduite­s sont le reflet d’un problème qui existe à travers l’ensemble des programmes de création littéraire au Canada.

COURS DANS LES BARS

Reste qu’au sein du programme de Concordia, il y a un réel problème d’absence de frontières entre professeur­s et étudiants, témoignent plusieurs.

L’auteur Guillaume Morissette, 33 ans, raconte que certains professeur­s donnaient carrément leur cours dans des bars lorsqu’il était étudiant entre 2010 et 2013. Il dit avoir vu des enseignant­s payer des verres d’alcool à des étudiantes.

« Tout cela participe à une culture où la médiocrité et les abus sont tolérés » et qui mine la qualité de l’enseigneme­nt dans le programme, affirme-t-il.

Newspapers in French

Newspapers from Canada