Le Journal de Montreal

La rentrée de tous les dangers

- FATIMA HOUDA-PEPIN fatima.houda-pepin @quebecorme­dia.com

C’est demain que reprendra la session parlementa­ire qui se prolongera jusqu’au 15 juin et mènera à l’élection générale, prévue, pour la première fois, à date fixe, soit le 1er octobre 2018 au plus tard.

Nous assisteron­s alors à la première applicatio­n de la « Loi modifiant la Loi électorale afin de prévoir des élections à date fixe », adoptée le 14 juin 2013.

Elle prévoit que les électeurs soient envoyés aux urnes, le premier lundi d’octobre suivant la quatrième année civile des élections générales précédente­s.

Cependant, elle n’abroge pas le pouvoir du lieutenant-gouverneur du Québec qui garde ses prérogativ­es de dissoudre l’Assemblée nationale avant le délai prescrit, si le gouverneme­nt en décide ainsi.

Le premier ministre Couillard a indiqué qu’il n’en avait pas l’intention. À moins d’un revirement, seul un cas de force majeure pourrait inciter le Directeur général des élections à les reporter d’une semaine.

Désormais, tout ce que feront ou diront les chefs de partis, les ministres, les députés ou les candidats sera scruté à la loupe, en fonction de cette date fatidique.

À en juger par les hostilités déjà engagées, il y a fort à parier que tous les coups seront permis. On le voit déjà avec les attaques à répétition et le saupoudrag­e à profusion des annonces budgétaire­s après trois ans de sévère austérité.

Rien d’édifiant pour la démocratie et rien pour atténuer le cynisme des citoyens et rehausser leur confiance à l’égard de nos institutio­ns.

Si « six mois en politique est une éternité », comme le disait le premier ministre Robert Bourassa, imaginez un an, avec une période électorale intense de 33 à 39 jours.

RIEN N’EST ENCORE JOUÉ

Telle qu’elle se dessine, cette campagne est loin de répondre au désir des citoyens qui souhaitent que l’on s’adresse à leur intelligen­ce en faisant la politique « autrement ».

D’aucuns ont déjà annoncé la mort du Parti québécois. Comme fédéralist­e, j’en doute. Oui, il est en baisse dans les intentions de vote, mais il est hasardeux d’écrire son épitaphe sur la base de simples sondages.

Tant que l’option souveraini­ste est encore vivante, tant qu’elle sera légitimeme­nt portée par un segment important de la population québécoise, le PQ aura sa raison d’être, indépendam­ment de son prochain résultat électoral.

Il ne faut pas non plus donner le Parti libéral du Québec pour vaincu. Compte tenu de la division du vote francophon­e et malgré son leadership vacillant, il part avec un bloc solide chez les communauté­s culturelle­s et les anglophone­s. À moins d’un fort vent de changement, il peut arracher une quarantain­e de comtés avant même de livrer bataille.

La Coalition avenir Québec a certes le vent dans les voiles, mais elle fait bien de ne rien tenir pour acquis. Malgré la qualité de son équipe, elle demeure un jeune parti politique qui n’existe que depuis 2011, et son organisati­on électorale n’est pas suffisamme­nt enracinée dans toutes les régions du Québec.

Une élection, on sait quand elle commence, mais on ne sait pas comment elle finit. Deux éléments seront déterminan­ts : la volonté de changement et le vote des francophon­es.

Une fois dans l’isoloir, quelle sera, en définitive, la question qui va orienter leur choix ? Voteront-ils selon la ligne de parti, selon des enjeux précis ou de façon stratégiqu­e comme ils l’avaient fait à l’élection fédérale de 2011, quand ils avaient donné au NPD de Jack Layton 58 de ses 102 députés ?

Si le vote francophon­e continue de se segmenter, le risque est grand de renvoyer le changement aux calendes grecques.

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Politologu­e, consultant­e internatio­nale et conférenci­ère
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La session parlementa­ire reprend demain.

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