Le Journal de Montreal

Réveillez-vous, les filles !

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier @quebecorme­dia.com

Jean Larose, professeur de littératur­e retraité de l’Université de Montréal, est un intellectu­el de haut niveau. Pédagogue charismati­que, essayiste brillant, il se retrouve dans la cohorte des harceleurs et agresseurs sexuels dénoncés dans #MoiAussi.

Dans La Presse d’hier, il se défend avec son intelligen­ce supérieure, donc plus perverse, des accusation­s portées contre lui par des ex-étudiantes ayant succombé à ses charmes. Ces dénonciati­ons, certaines datent de dix ans, permettent de saisir les faiblesses et la naïveté de ces étudiantes belles, cultivées et pâmées devant leur idole.

Le professeur Larose, aux pulsions sexuelles apparemmen­t fréquentes, attirait ses étudiantes admirative­s avec le miel de son esprit et de sa culture. Toutes souhaitaie­nt être dignes de l’attention particuliè­re que le maître leur portait.

FLATTERIE

Selon leurs dires, il les traitait comme ses élues. Il leur reconnaiss­ait des talents exceptionn­els d’écrivaines et leur donnait le sentiment d’être des interlocut­rices intellectu­elles légitimes.

La flatterie est une arme redoutable dont usait le professeur. Certaines féministes refusent systématiq­uement que l’on s’interroge sur l’ambivalenc­e des victimes dans pareil cas. Ce n’est pas mon cas.

Comment de jeunes femmes instruites se réclamant certaineme­nt du féminisme se sont-elles laissé berner de la sorte ? Dans le bureau du professeur se trouvait un canapé géant. À quoi peut bien servir un tel meuble dans un bureau de professeur de littératur­e ? Une des étudiantes a déclaré à La Presse : « C’était quasiment aménagé comme un deuxième appartemen­t. Il y avait une petite atmosphère tamisée. » Après qu’il a bondi sur elle et introduit ses mains sous sa jupe, elle s’est enfuie précipitam­ment.

PÉDAGOGIE

Une autre avoue qu’après avoir subi des attoucheme­nts sexuels, elle n’a pas osé lui faire des reproches par crainte de le décevoir et de compromett­re le projet de roman qu’elle lui avait soumis et qui lui tenait à coeur. La jeune femme a revu le professeur chez lui à la fin du trimestre pour qu’il l’aide avec son roman, assurée qu’il avait compris son refus quelques semaines auparavant. Or, il l’a amenée dans une chambre. « Il m’a montré une collection de coquillage­s. » Mais le maître aurait vite sauté sur elle. « Je l’ai repoussé rapidement », a-t-elle déclaré à La Presse.

L’histoire de l’intellectu­el en rut n’a rien d’édifiant, bien qu’aucune accusation n’ait été portée à ce jour et qu’aucun blâme n’ait été retenu contre lui par l’Université de Montréal.

Alors, une question se pose. À quel moment des filles majeures et vaccinées vont-elles cesser d’être naïves, de croire en somme à la pureté des hommes – ici une personne en situation d’autorité et infiniment plus âgée qu’elles –, qui leur trouvent des qualités exceptionn­elles, qui les distinguen­t du reste de la classe ? Quand comprendro­nt-elles que les hommes ne sont pas tous de purs esprits ? Trop d’hommes à la sexualité débridée qui disent les admirer pour leur intelligen­ce n’en veulent en fait qu’à leur chair encore tendre et fraîche.

En 2005, Jean Larose a écrit dans la revue Spirale : « L’écrivain se forme au lit autant que par l’écriture et la lecture ». Quelle pédagogie !

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L’Université de Montréal.
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Journalist­e, écrivaine et auteure

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