La capitulation d’Ottawa serait « catastrophique »
Le seuil d’exemption de taxes inquiète les entreprises
OTTAWA | Tout juste avant de rencontrer les PDG des géants du web Amazon et eBay, hier, Justin Trudeau a refusé de s’engager à maintenir à 20 $ le seuil d’exemption de taxes sur les achats internationaux en ligne. Si le Canada plie sur cette question, plusieurs intervenants redoutent des conséquences catastrophiques.
« Si le gouvernement Trudeau va de l’avant avec cette demande des entreprises américaines, il y aura des mises à pied dans le secteur du commerce du détail tout en privant le gouvernement fédéral de 1,5 milliard $ de revenus par année », s’est désolé Jacques Nantel, professeur émérite du département de marketing à HEC Montréal.
En ce moment, un Canadien qui achète un bien d’un pays étranger sur le web paie des taxes si l’achat coûte plus de 20 $. Pour un Américain, cette limite est fixée à 800 $.
Dans le cadre des renégociations de l’Accord de libre-échange nord-américain, les États-Unis souhaitent que le Canada ajuste son seuil à la hausse, pour encourager les consommateurs canadiens à acheter davantage au sud de la frontière.
À la deuxième journée de sa mission aux États-Unis hier, le premier ministre du Canada a assuré qu’il défendrait les intérêts des Canadiens et des PME, sans toutefois donner de garanties. « On ne va pas négocier sur la place publique », a-t-il laissé tomber en conférence de presse à San Francisco.
DANGEREUX
« On va faire fermer beaucoup d’entreprises si on monte la limite à 800 $, ou même 200 $. Ça serait complètement catastrophique », s’est exclamé Léopold Turgeon, président-directeur général du Conseil québécois du commerce de détail (CQCD).
Des députés de l’opposition ont exhorté Ottawa à ne rien céder aux Américains et aux géants américains du web dans ce dossier.
« Le Canada ne doit jamais plier, parce que ça va tuer tous nos commerces », a plaidé le député bloquiste Gabriel Ste-Marie.
Pour le Nouveau Parti démocratique, le gouvernement Trudeau s’apprête à avaler une « pilule empoisonnée » s’il considère abolir la limite de 20 $. « Déjà, nos entreprises font concurrence avec des géants qui ne paient pas la TPS ou leurs impôts au Canada, et maintenant il faudrait qu’il y ait un seuil à 800 $ pour ne payer aucune douane ? C’est très dangereux », a mis en garde le député de Sherbrooke Pierre-Luc Dusseault.