Le Journal de Montreal

Increvable, la Russie !

- RICHARD richard.latendress­e@quebecorme­dia.com LATENDRESS­E

C’est comme s’il existait deux Russies : celle qui occupe le plus vaste territoire de la planète, héritière de l’empire soviétique et fautrice de troubles par excellence. Puis, il y a celle qui se serait mêlée de l’élection présidenti­elle américaine, en menant sournoisem­ent une campagne pour dénigrer Hillary Clinton et ultimement favoriser Donald Trump.

L’une est concrète, l’autre est cyber-réelle. Washington est obsédé par la seconde, alors que la première s’apprête à reporter au pouvoir un homme qui traverse tempête après tempête en maintenant au-delà de 80 % d’appui. Par toutes sortes de manigances, Vladimir Poutine s’accroche au Kremlin et force le monde à respecter un pays qui n’est pourtant que l’ombre de ce qu’il a été.

Il n’y a qu’à voir le nombre de Russes eux-mêmes. C’est une réalité de tous les pays industrial­isés, le taux de fécondité est faible et les population­s croissent lentement. En Russie, c’est pire encore : l’année dernière, la population a reculé de 134 400 habitants.

La crise économique qui a suivi l’éclatement de l’URSS a notamment provoqué une chute des natalités. Conséquenc­e, de 9e pays le plus peuplé de la planète, le nombre réduit de femmes russes en âge de procréer va tirer le pays vers le bas, ne le plaçant en 2050, selon les démographe­s, qu’au 15e rang derrière les Philippine­s et la Tanzanie.

DES COUPS DE MAIN MILITAIRES COÛTEUX

On parle beaucoup des milliers de milliards de dollars dilapidés par les États-Unis en Afghanista­n et en Irak au cours des 17 dernières années. La Russie n’a pas échappé à sa dose de gaspillage avec son invasion de la Crimée, son aide aux rebelles prorusses en Ukraine et son généreux soutien au régime de Bachar al-Assad en Syrie.

Le Kremlin n’a pas englouti autant d’argent que la Maison-Blanche dans ses aventures militaires, mais l’économie russe n’a rien à voir avec celle des ÉtatsUnis. Avec quatre fois plus d’habitants, le PIB de la Russie se classe derrière celui du Canada.

Et même si Moscou n’en est plus à tirer la moitié de son budget des revenus du pétrole, les sanctions occidental­es à la suite de l’invasion de la Crimée continuent de faire mal. Pourtant, en valorisant la stabilité au détriment de la croissance, Vladimir Poutine est parvenu à en minimiser l’impact sur ses compatriot­es.

ON NE RÉVOLUTION­NE RIEN

L’inflation reste faible, ce que les retraités apprécient, eux dont les pensions sont maintenant versées de manière constante. Les salaires n’augmentent pratiqueme­nt pas, mais le chômage est maintenu bas, ce qui évite la grogne populaire.

Bref, le « dynamisme économique » ne fait pas partie du vocabulair­e russe, mais la population — c’est aussi dans son caractère — se satisfait du tranquille équilibre actuel. Ce qui va contribuer à maintenir Vladimir Poutine au pouvoir. Cela et le fait aussi que son principal opposant, Alexeï Navalny, a été exclu du processus électoral pour des condamnati­ons criminelle­s, montées de toutes pièces, selon lui.

Le chemin est donc libre pour la réélection de Poutine qui en sera à son dernier mandat, puisque la constituti­on russe limite la présidence à deux mandats consécutif­s. Où en sera-t-on alors en 2024 ? Qui sait ? Poutine pourrait bien vouloir continuer à « servir » la Russie, la constituti­on pourrait bien subir, comme par hasard, une mise à jour appropriée et les Russes euxmêmes pourraient bien vouloir continuer de s’abandonner à leurs vieux démons de la stabilité à tout prix. Une étape à la fois, mais soyons réalistes : on ne semble pas prêt de retirer Poutine du menu politique russe.

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