Le Journal de Montreal

La sainte paix vaut mieux qu’une vie bancale à deux

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J’ai lu avec tristesse la lettre signée « Prise au piège » ce matin parce que j’étais jadis dans une situation semblable. Heureuseme­nt, je m’en suis sortie. Je n’ai pas de conseils à donner à cette femme, car je sais que tant qu’elle n’aura pas touché le fond, elle ne fera rien pour changer sa situation, aussi horrible soit-elle au quotidien.

Comme le sien, mon mari ne me respectait pas. J’étais sa servante et j’assumais mon rôle, m’imaginant comme elle qu’un beau jour, il allait se rendre compte de l’être admirable qu’était sa femme. Je dis cela de façon un peu ironique, car, comme elle, j’ai fréquenté un psy qui a si bien ciblé mon problème, que vu mon absence de volonté de changement, j’ai interrompu nos rencontres.

Contrairem­ent à elle en plus, je ramenais du cash à la maison puisque je travaillai­s trois jours par semaine. J’aurais pu faire plus, mais je voulais m’occuper avant tout de ma famille. Tout cela pendant que mon homme se fichait de moi comme de sa dernière chaussette et que mes enfants me méprisaien­t un peu plus chaque jour pour ma lâcheté.

Il a fallu que je fasse un cancer du sein pour qu’un déclic se fasse. Quand je lui ai annoncé la nouvelle d’ailleurs, son seul commentair­e fut : « Non mais pas ça en plus ! » Là, j’étais sciée. Il n’a rien fait pour moi pendant ma chimio et mes deux enfants en ont profité pour quitter la maison. Seule face à celui qui me regardait avec dédain à la suite de ma mastectomi­e, je me rendais compte du vide de ma vie.

Que me restait-il à perdre ? Certaineme­nt pas grand-chose, vu mon piètre état physique et la perspectiv­e du partage du patrimoine que me faisait miroiter mon unique soeur célibatair­e qui avait entrepris de m’aider, elle qui ne venait plus chez nous vu l’attitude de mon mari envers moi, mais qui m’avait soutenue en m’accompagna­nt à mes traitement­s.

Deux ans après mon diagnostic, en rémission de mon cancer, avec une énergie renouvelée grâce à l’aide de la Fondation du cancer du sein du Québec ainsi que l’élan que mettait ma soeur à me sortir de mon bourbier matrimonia­l, j’ai entrepris les démarches pour obtenir mon divorce.

« Ma chère « Prise au piège », vous êtes chanceuse de vous en sortir juste avec des antidépres­seurs. Mais n’attendez pas que quelque maladie pire que juste des troubles anxieux vous tombe dessus pour vous décider à réagir. Le jour où vous allez vous respecter, vos enfants vous reviendron­t, exactement comme les miens. Et en passant, mon psy avait fini par me dire de ne plus venir le voir puisque je ne voulais pas changer. Si le vôtre continue à vous voir malgré votre non-envie de régler vos problèmes, posez-vous des questions sur sa compétence. C’est à vous de jouer maintenant ! »

Si vous saviez Louise comme la vie est douce quand on a la sainte paix et qu’on ne se sent plus l’équivalent du tapis sur lequel un homme se frotte les pieds sans remarquer sa douceur. Vous avez tellement bien fait de lui dire ses quatre vérités. C’est ce que ma chère soeur a fait et ça m’a réveillée. J’espère que ça agira de même sur elle. J’aime tellement ma vie d’aujourd’hui

Une autre lectrice m’a dit exactement le contraire de votre dernier commentair­e. Pour elle, j’aurais dû la ménager. Mais je persiste à penser que pour quelqu’un qui est rendu à la limite du supportabl­e et qui ne bouge pas d’un poil pour améliorer son sort et sa vie, seul un traitement-choc a encore des chances de produire une réaction.

Merci d’avoir pris le temps de partager votre expérience, et de prouver par la même occasion que tout est possible quand on veut améliorer son sort.

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