Le Journal de Montreal

Entre dauphin et canard boiteux

- RICHARD LATENDRESS­E richard.latendress­e@quebecorme­dia.com

On entre… et on sort comme d’un moulin de la Maison-Blanche de Donald Trump. Le New York Times a calculé que le taux de roulement du personnel est le plus élevé depuis des décennies : 34 %, le double de ce qui avait été vécu au cours de la première année de l’administra­tion Reagan, la pire jusqu’à maintenant. Il y a un homme toutefois qui n’a pas bougé et qui n’a certaineme­nt pas l’intention de le faire, le vice-président Mike Pence.

Il a pourtant eu toutes les raisons du monde de claquer la porte. Déjà, en campagne électorale, l’enregistre­ment des propos de Donald Trump à Access Hollywood, se vantant de pouvoir « mettre la main à la chatte » de n’importe quelle femme puisqu’il était une célébrité, aurait dû pousser Pence à conclure que Trump était un vulgaire personnage auquel il n’était pas digne de rester associé.

Ou récemment encore, lorsque Trump a qualifié les pays africains de « trous à merde » et affirmé qu’il y a avait amplement d’Haïtiens aux États-Unis, Mike Pence aurait pu juger que de telles paroles n’exprimaien­t ni charité ni bienveilla­nce devant la misère humaine.

Il pourrait d’ailleurs dire la même chose ces temps-ci, alors qu’il apparaît de plus en plus clairement que le président, son chef de cabinet et à peu près tous ceux qui ont un minimum de pouvoir dans cette Maison-Blanche ont préféré protéger un assistant de Trump avec un réflexe et des antécédent­s de violence conjugale plutôt que de donner du crédit aux femmes qui affirmaien­t que l’homme est un dangereux personnage.

De cette affaire-ci, celle de Rob Porter qui continue de faire des remous à la Maison-Blanche, comme les autres, il s’en est vaguement offusqué, mais fiez-vous à moi, ça ne durera pas. Le chrétien intense qu’est Mike Pence perd de sa contenance et de sa miséricord­e devant Donald Trump et redevient le chien de poche que le président attend de son numéro deux.

UN HOMME QUI VOIT LOIN

C’est que Mike Pence a, à la fois, un plan et une mission en tête. Sa mission est de ramener les ÉtatsUnis sur le chemin de la bonne vieille foi chrétienne, un chemin duquel le pays s’est écarté, croit-il, depuis plus d’un quart de siècle.

Hier, par exemple, c’est lui que Donald Trump avait délégué au Musée national d’histoire africaine-américaine pour souligner le mois de février, le Black History Month. Pence, tout en encensant le rôle des Noirs dans l’histoire américaine, n’a pas manqué, comme il le fait systématiq­uement, de citer le Nouveau Testament, cette fois-ci 2 Corinthien­s 3 : 17, « Là où est l’esprit du Seigneur, il y a la liberté. »

Quant à son plan, il est en marche depuis que Donald Trump l’a arraché à sa propre détresse. Pence était le gouverneur impopulair­e de l’Indiana, clean-cut, mais sans chance de réélection, quand le candidat Trump l’a choisi, en juillet 2016, comme colistier. Depuis ce jour, il louange sans honte le milliardai­re new-yorkais, conscient que s’il fait le choix de ne pas se représente­r, voire si les démocrates réussissai­ent à le destituer, c’est entre ses mains que la présidence tomberait.

Faut-il s’en inquiéter ? Pence, c’est clair, est un conservate­ur ultra-radical. Dernière à l’affirmer : Omarosa Manigault, ex-vedette de The Apprentice, la série de télé-réalité animée par Trump, fraîchemen­t sortie de la Maison-Blanche où elle occupait un poste de relations publiques.

« Il est extrême », dit-elle, « il est persuadé que Jésus lui dit quoi faire. » Venant d’elle, ça vaut ce que ça vaut. Reste que Pence comme alternativ­e à Trump ? Pas sûr que les Américains en sortiraien­t gagnants.

« Il est persuadé que Jésus lui dit quoi faire »

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PHOTO AFP Mike Pence veut ramener les États-Unis sur le chemin de la bonne vieille foi chrétienne.
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