L’indéfendable prime
L’éphémère patron du Centre de services partagés du Québec, limogé par le gouvernement pour s’être placé en situation de conflit d’intérêts, a quitté son emploi avec une révoltante « allocation de transition » de 200 000 $ en octobre. Or, Christian Goulet n’a même pas eu le temps de dépenser son gros lot public qu’il a retrouvé un emploi dans une grande firme technologique dès janvier.
Son histoire illustre à merveille le monde à part que constitue la haute fonction publique. Après une carrière chez Bell, il a atterri à l’organisme responsable des projets informatiques gouvernementaux en avril 2017.
Deux mois plus tard, le mandarin était suspendu de ses fonctions, le CSPQ ayant appris qu’il était lié à une enquête policière. Payé à ne rien faire chez lui jusqu’en octobre, il a été officiellement relevé de ses fonctions, notamment parce qu’il avait omis de déclarer lors de son embauche qu’il détenait des actions de Bell et CGI, entreprises susceptibles de profiter de généreux contrats de l’organisme. Pour le jugement, on repassera !
Malgré tout, le président du Conseil du trésor, Pierre Arcand, a asséné que lui verser 200 000 $ était la « meilleure décision dans les circonstances ».
L’homme à la longue carrière dans les hautes technologies avait-il besoin d’une « allocation de transition » ? Non, il est devenu conseiller stratégique chez Levio, sans même avoir eu le temps de s’ennuyer des murs beiges du bunker de la Grande Allée.
UNE STATUE POUR SAINT-GERMAIN ?
Les scandales de primes de départ versées à l’aveuglette, sans respect pour les deniers publics, sont fréquents.
L’exception est tellement spectaculaire qu’il incombe de la rappeler.
L’ex-protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, a laissé sur la table une prime de départ de 210 000 $ en quittant ses fonctions en 2017, au terme de deux mandats de cinq ans. Mandats pendant lesquels elle s’est dévouée pour les personnes vulnérables.
Bien sûr avec sa généreuse rente de retraite de protectrice, qui s’élève à 104 000 $, et son nouveau salaire de sénatrice fédérale de 145 000 $, la dame ne craint pas pour ses fins de mois. Mais, elle y avait droit.
Qui d’autre aurait eu le courage de laisser sur la table un tel magot ?
Après les Stastny au Centre Vidéotron, on devrait lui ériger une statue devant l’édifice du Conseil du trésor.
RIEN À FAIRE
À son départ, Mme Saint-Germain a plaidé pour que le gouvernement Couillard révise le caractère automatique de l’attribution du pactole.
Alors titulaire du Trésor, Pierre Moreau avait promis une réflexion sur ces « enjeux ».
Mais, rien n’y fait. Même dans les cas de transitions virtuelles, les mandarins pourront encore se régaler des milliers de dollars des pauvres contribuables.
En entrevue avec notre Bureau parlementaire, le patron des emplois supérieurs, André Fortier, a continué l’automne dernier de défendre ces alléchantes primes.
Sans elles, le secteur public ne serait pas assez attrayant pour recruter des dirigeants de qualité. Comme Christian Goulet…