Le Journal de Montreal

Pas assez handicapée selon Québec

Une mère doit aller en cour pour justifier que les lourds problèmes de sa fille méritent qu’on la soutienne À bout de souffle, la mère d’une jeune fille lourdement handicapée suivie par une quinzaine de spécialist­es trouve aberrant qu’on lui refuse une ai

- VINCENT LARIN

« Camille, elle ne peut même pas manger par elle-même. Ce n’est pas vrai qu’elle est autonome », soupire Valérie Larouche, l’air découragé.

Retraite Québec a récemment refusé pour la deuxième fois à cette mère l’accès au supplément pour enfant handicapé nécessitan­t des soins exceptionn­els (SEHNSE). Mis en place en 2016, ce programme permet aux parents d’enfants lourdement handicapée­s d’encaisser tous les mois 962 $ pour les aider à prendre soin de leur progénitur­e (voir ci-contre).

Or, la petite Camille ne répond pas aux critères du programme, selon l’organisme, malgré le fait qu’elle doit faire l’objet d’une surveillan­ce à tout moment du jour ou de la nuit.

SURVEILLAN­CE CONSTANTE

C’est qu’en plus d’être aveugle d’un oeil, Camille doit porter en tout temps un appareil auditif, présente des retards mentaux et de croissance importants ainsi que de nombreuses malformati­ons physiques. Malgré ses 13 ans, elle se comporte aussi comme si elle en avait 4 et éprouve de sérieuses difficulté­s à s’exprimer.

Retraite Québec justifie en partie le rejet de son dossier par le fait qu’elle peut parcourir une « certaine distance » sans aide. Un test fourni par une des spécialist­es de l’enfant démontre toutefois qu’elle se déplace beaucoup plus difficilem­ent qu’une enfant au développem­ent normal. Et de toute façon, « hors de question de la laisser seule dans la rue », lance Mme Larouche.

« Camille, si tu la laisses aller, elle sort à l’extérieur sans manteau l’hiver. Elle peut se déplacer, sauf qu’elle voit seulement en deux dimensions, donc les trottoirs, elle ne connaît pas et elle ne connaît pas non plus la notion de danger », explique sa mère.

La chef du service de pédiatrie du CHU Sainte-Justine, Isabelle Chevalier, qui suit le dossier de Camille depuis une dizaine d’années, en rajoute dans une lettre envoyée à Retraite Québec.

« La lourdeur des soins requis m’apparaît à plusieurs égards comparable­s à la lourdeur des soins pour mes patients qui reçoivent des soins médicaux complexes à domicile », décrit-elle.

INQUIÈTE POUR L’AVENIR

Pour Valérie Larouche, qui passe son temps à courir les rendez-vous médicaux, le SEHNSE représenta­it une opportunit­é rare de pouvoir souffler un peu et d’éviter d’avoir à s’endetter encore plus.

Elle se dit inquiète pour l’avenir puisque Camille est sur le point d’entrer au secondaire où aucun service de garde n’est mis à la dispositio­n des parents.

Le dernier moyen de faire valoir son point sera de se présenter devant le Tribunal administra­tif du Québec. Une situation qui est loin de la réjouir, car elle a déjà passé des centaines d’heures à remplir le dossier de Camille.

Un porte-parole de Retraite Québec a répondu au Journal qu’il ne commentait pas les dossiers particulie­rs.

« Comme la situation de chaque enfant est différente, les demandes sont évaluées par notre équipe médicale qui s'assure de les traiter de façon équitable », a toutefois précisé le porte-parole Frédéric Lizotte dans un échange de courriels.

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Valérie Larouche trouve incompréhe­nsible que Québec lui refuse un coup de main financier pour l’aider à prendre soin de sa fille de 13 ans, Camille, qui est lourdement handicapée et qui doit faire l’objet d’une surveillan­ce constante.

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