Place aux capteurs de rêves
L’une des forces des acrobates du cirque contemporain réside dans leur capacité à intégrer les autres formes d’art. Il suffit d’assister aux Coups de coeur 2018 de la Tohu pour s’en convaincre.
Pour une troisième année et jusqu’au 4 mars, la Tohu tient son gala consacré à la discipline circassienne et, plus particulièrement, à ses étoiles d’ici et d’ailleurs. Cette grande fête mise en scène par Fernand Rainville, l’animateur de la soirée - un Sébastien Soldevila des 7 Doigts, haut en verbe et en humour - la décrit comme « un florilège de ce qui se fait de mieux aux quatre coins de la planète ». S’il n’est pas question de s’immerger dans l’univers merveilleux d’une production, on ressort néanmoins impressionné, de la salle circulaire.
Parmi la dizaine de numéros-signatures sans autre fil conducteur que l’excellence de leurs artistes, celui de Matthew Richardson (soliste dans Varei
kai du Cirque du Soleil) vaut presque à lui seul le déplacement. À bord de sa roue Cyr transformée en capteur de rêves, le saltimbanque rend hommage à son père décédé. En moins de cinq minutes, son tour de piste à fleur de peau, où l’on entend des bribes de conversations avec celui qui l’a engendré, aboutit en une véritable oeuvre peinte, dont on peut même se procurer un exemplaire.
« UN SPORT NATIONAL »
Les Coups de coeur sont aussi l’occasion de découvrir des talents rattachés à des compagnies et à des spectacles qui ne se sont jamais encore arrêtés dans la métropole. C’est le cas des Américains Mary Wolfe et Tyce Nielsen, qui forment un couple redoutable sur trapèze comme dans la vie. Mais ce sont surtout les soeurs contorsionnistes mongoles Erdenesuvd et Buyankhishing Ganbaatar qui captent l’attention. Leur force, leur grâce et leur symbiose nourrissent autant les réactions incrédules que contemplatives tout au long de leurs six minutes sous les projecteurs. « La contorsion, c’est un p’tit peu leur sport national », prévient d’ailleurs notre hôte.
Des visages plus connus ne laissent personne de glace en foulant l’arène de la cité des arts du cirque. Le duo de main à main, composé de Julius Bitterling et César Mispelon du Cirque Éloïse, suscite à la fois rires et étonnement. Aimantés l’un à l’autre, les comparses se chamaillent, s’escaladent et s’entortillent tels deux bouts de ficelles impossibles à démêler.
CLOWNESQUE
Hugo Ouellet-Côté de Flip Fabrique est lui aussi spectaculaire et clownesque. Ce maître des sangles, non seulement frappe l’imaginaire dans un extrait de Transit, avec les images que son téléphone tenu à bout de pied retransmet en simultané sur écran géant, mais amuse également les plus petits, plongeant tête première pour attraper un beigne au sol sur l’air des Bonbons de Jacques Brel. Mention spéciale également à Marie Ève Bisson et son numéro de cerceau, tiré de Kooza du Cirque du Soleil, à Jonathan Morin, l’inventeur de la roue croisée, ainsi qu’à la Britannique Nicole Heaslewood et son hula hoop de feu.