Le Journal de Montreal

C’EST LA FOLIE DÉPENSIÈRE AU MOIS DE MARS

Les organismes gouverneme­ntaux dépensent six fois plus lors des quatre dernières semaines de leur année financière

- – Avec la collaborat­ion de Marie-Christine Trottier, Agence QMI JEAN-NICOLAS BLANCHET

QUÉBEC | Bon an mal an, les organismes publics québécois dépensent presque six fois plus en mars que la moyenne des autres mois en fourniture­s de bureau et équipement­s informatiq­ues, selon une compilatio­n réalisée par notre Bureau d’enquête.

La fièvre du mois de mars dans la fonction publique n’est pas un mythe. Elle frappe bien le Québec à cette période-ci.

Dans le monde des fonctionna­ires, le phénomène est surnommé « vider les fonds de tiroirs » ou le « March Madness ».

Cette fièvre dépensière s’explique par la fin de l’année financière qui survient en mars pour la plupart des organismes québécois (pour les autres, c’est décembre).

Autrement dit, un organisme qui ne dépense pas tout son budget avant le 31 mars peut s’en voir amputer une partie l’année suivante.

BUREAUX, CHAISES, TABLES,

« Il y a des rencontres en février et on se demande ce qu’on pourrait devancer comme dépenses pour s’assurer de garder le même budget. C’est le temps d’acheter des bureaux, chaises, tables, imprimante­s ou ordinateur­s, par exemple », explique un ancien haut fonctionna­ire québécois.

« Tant que les budgets sont établis de cette façon-là, dit-il, cette situation va perdurer. »

Le directeur général de l’Institut sur la gouvernanc­e, Michel Nadeau, croit que « ce n’est pas une bonne façon de gérer les deniers publics ».

« C’est l’obsession, pour les organismes, de vider les tiroirs afin qu’il ne reste rien, dit-il. Si vous ne les videz pas, le gouverneme­nt va les vider à votre place.

« Est-ce que ce sont toutes des dépenses pertinente­s? Je n’en suis pas certain », explique celui qui a aussi été membre de la haute direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

M. Nadeau estime que si les organismes savent que leurs surplus vont disparaîtr­e, il est normal de s’attendre à ce qu’ils se « paient la traite » en fin d’année.

UNE SOLUTION ?

La solution pour lui est de permettre à ces entités de conserver leurs surplus, même s’ils ne les dépensent pas, et de ne pas modifier pour autant leur budget de l’année subséquent­e.

Ce faisant, les organismes pourraient garder un meilleur « fonds de réserve » pour des projets stratégiqu­es. « Ça aurait beaucoup plus d’allure que les courses des derniers jours de mars! » poursuit M. Nadeau.

Notre Bureau d’enquête a effectué une série de demandes d’accès à l’informatio­n pour évaluer les dépenses, par mois, de 10 ministères ou organismes, en 2016 ou 2017.

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