Le Journal de Montreal

DES RISTOURNES DE 10 M$ EN ÉCHANGE DE CONTRATS

Les fournisseu­rs d’équipement­s médicaux forcés de faire des chèques aux hôpitaux du Québec

- Vous avez de l’informatio­n à ce sujet ? ericyvan.lemay@quebecorme­dia.com Éric Yvan Lemay EYLemayJDM

Les hôpitaux du Québec se partagent 10 millions de dollars par année en ristournes cachées provenant des fabricants d’équipement­s médicaux, une situation unique en Amérique du Nord.

Un fournisseu­r de prothèses de hanche et de genou s’apprête à faire un chèque d’au moins 5 M$ à ses clients, une poignée d’hôpitaux de la Montérégie, des Laurentide­s et de l’ouest du Québec.

Geste illégal ? Tentative de corruption ? Pas du tout. Il s’agit d’une ristourne exigée dans l’appel d’offres qui vient d’être lancé conjointem­ent par ces établissem­ents de santé, a découvert notre Bureau d’enquête.

« Il n’y a qu’au Québec qu’il y a des ristournes comme ça », dit Benoît Larose, vice-président de MEDEC, une associatio­n qui représente plusieurs fournisseu­rs d’équipement­s médicaux.

PRIX GONFLÉS

Ce n’est pas de gaieté de coeur que les entreprise­s qu’il représente acceptent de payer des ristournes aux établissem­ents de santé québécois.

Certaines firmes américaine­s craignent même de contourner les règles anticorrup­tion de leur pays en agissant ainsi. De plus, aucune autre province canadienne n’a ce type d’exigence.

Le gouverneme­nt du Québec préfère appeler ces ristournes « contributi­ons au partenaria­t ». Elles correspond­ent à entre 10 et 12 % des ventes de l’entreprise gagnante, qui doivent en tenir compte lorsqu’ils fixent leurs prix.

« C’est vu comme une taxe. Il [le gouverneme­nt] aurait de meilleurs prix s’il n’y avait pas de ristournes », dit Benoît Larose.

MANQUE DE TRANSPAREN­CE

Dans le cas de l’appel d’offres pour les prothèses de hanche et de genou lancé il y a quelques semaines par le Groupe d’approvisio­nnement en commun de l’Ouestdu-Québec (GACOQ), les ristournes atteindron­t donc plus de 5 M$, car le contrat est estimé à au moins 50 M$.

Plusieurs fournisseu­rs se plaignent de ne pas savoir à quoi servent exactement les millions versés aux hôpitaux.

« Il y a un manque de transparen­ce et d’assurances. On n’a aucune idée précise [à quoi sert l’argent] », dit une représenta­nte d’un fournisseu­r qui veut conserver l’anonymat.

Et même si les hôpitaux doivent rendre des comptes sur leurs dépenses au gouverneme­nt et aux groupes d’approvisio­nnement en commun, ces informatio­ns ne sont jamais rendues accessible­s au public.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Un récent appel d’offres pour l’achat de prothèses de hanche et de genou prévoit une ristourne obligatoir­e dépassant 5 millions de dollars, qui sera versée par le fabricant aux hôpitaux avec qui il fait affaire. On voit sur cette photo une opération pour l’installati­on d’une prothèse de genou réalisée dans un centre hospitalie­r québécois.
PHOTO D’ARCHIVES Un récent appel d’offres pour l’achat de prothèses de hanche et de genou prévoit une ristourne obligatoir­e dépassant 5 millions de dollars, qui sera versée par le fabricant aux hôpitaux avec qui il fait affaire. On voit sur cette photo une opération pour l’installati­on d’une prothèse de genou réalisée dans un centre hospitalie­r québécois.
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