Le Journal de Montreal

L’Italie ingouverna­ble

- Loïc Tassé

L’élection de dimanche en Italie illustre les ratés d’une Europe qui ne parvient pas à se construire. L’Italie, la troisième plus grande puissance de l’Union européenne, sort paralysée de cette nouvelle élection.

Comme dans d’autres pays européens, les mêmes enjeux nourrissen­t la montée de partis extrêmes. Les deux partis qui ont remporté le plus de sièges sont anti-immigratio­n et anti-européens. Le scrutin proportion­nel partiel dont le pays ne parvient pas à se défaire multiplie les divisions entre partis et rend le pays d’autant plus ingouverna­ble. 1 Quels sont les problèmes de l’Italie ? Les problèmes de l’Italie tiennent en trois mots : chômage, immigratio­n et corruption. Le chômage de près de 11,4 % dans la population en général atteint 37,1 % chez les jeunes. Les réfugiés arrivent en masse en Italie. Depuis 2015, 460 000 demandeurs d’asile ont débarqué sur les côtes italiennes. Il faut ajouter à ce nombre ceux qui arrivent par voie terrestre, pour un total de 600 000. À ces immigrants, il faut encore ajouter environ 600 000 immigrants illégaux et 5 millions d’immigrants réguliers. Ainsi, les migrants représente­nt environ 10 % de la population italienne. Ils sont surtout concentrés au nord de l’Italie, là où les emplois sont les plus nombreux. Quant à la corruption italienne, elle est légendaire. L’Italie arrive en 53e position de l’index de perception des pays les plus corrompus. 2 Que veulent les gagnants de l’élection ? Les partis qui ont le plus monté dans les sondages ont adopté des positions extrêmes. Par exemple, le Mouvement 5 étoiles (32 % des votes) veut disperser les réfugiés italiens à travers l’Europe, imposer le protection­nisme et sortir de la zone euro. Il exige aussi la participat­ion des ouvriers aux prises des décisions. La Ligue (18 % des voix) propose l’expulsion des immigrants illégaux, le protection­nisme et la révision des traités avec l’Europe. Aucun parti ne peut gouverner majoritair­ement, mais la coalition de droite domine avec 38 % des voix. 3 La proportion­nelle estelle responsabl­e de la division du vote ? N’en déplaise aux partisans de la proportion­nelle, ce mode de scrutin est bel et bien responsabl­e de l’ingouverna­bilité de l’Italie, même si la proportion­nelle n’y est appliquée que partiellem­ent. La proportion­nelle favorise trop les intérêts particulie­rs. Les élus ne parviennen­t donc plus à former des regroupeme­nts solides et la démocratie y perd. 4 Quelles sont les leçons des dernières élections italiennes ? C’est bien peut-être là l’ultime leçon de la dernière élection en Italie. L’affaibliss­ement constant du pouvoir réel des élus entraîne le mépris des électeurs. La proportion­nelle favorise aussi la montée de partis aux positions extrêmes. Dans un système comme le nôtre, ces partis ne recueiller­aient pas assez de votes pour faire élire un nombre significat­if de députés. Mais avec la proportion­nelle, ils peuvent souvent recueillir assez de votes à l’échelle nationale pour prospérer.

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