Le Journal de Montreal

Miser sur le bon goût des insectes

Une première ferme d’élevage de ténébrions au Québec devrait voir le jour d’ici la fin de l’année

- MARIE-ÈVE DUMONT

Les propriétai­res d’une entreprise québécoise de pâtes aux insectes travaillen­t à l’ouverture de la première ferme d’élevage de ténébrions au Québec en misant sur leur goût de noix et de graines de tournesol.

« Le fait de produire nous-mêmes baissera nos coûts de production afin que nos pâtes soient plus accessible­s. On aimerait offrir d’autres produits comme des sauces en poudre, des trucs sucrés, ou même faire du pain », souhaite Claude Girard, l’un des quatre propriétai­res de Tottem Nutrition, qui commercial­ise depuis près d’un an des coquilles faites à base de farine de ténébrions et de grillons. Un sac de 95 g se vend en ce moment 3,75 $.

L’intérêt des consommate­urs pour les produits faits à base d’insectes grandit. Le géant Loblaw a mis des paquets de 113 g de poudre de grillons sur les tablettes de ses supermarch­és Provigo.

« Les ventes de produits dérivés d’insectes augmentent de 50 % par année en Occident. Il y a quelque chose qui se passe. Il y a donc, selon moi, un intérêt pour Loblaw d’évaluer l’aspect commercial de ce produit-là. Il tâte le terrain », estime Sylvain Charlebois, doyen de la Faculté de management à l’Université Dalhousie, à Halifax.

Des entreprise­s au Québec commercial­isent déjà depuis quelques années des produits à base de farine d’insectes, le plus souvent le grillon, comme des barres pour sportifs.

« ÇA GOÛTE LE MAÏS »

L’avantage qui est souvent mis de l’avant pour encourager les consommate­urs à se procurer de tels produits est le taux élevé de protéines qu’on y retrouve. Il s’agit donc d’une alternativ­e intéressan­te à la viande (voir autre texte).

Mais les propriétai­res de Tottem Nutrition croient que pour conquérir le coeur des consommate­urs, il faut miser sur le goût associé à chaque insecte.

« Si on veut casser la réaction de dégoût qui y est associée, on n’a pas le choix », insiste M. Girard, qui est chef de formation.

Pour y arriver, ils ont concentré leurs efforts sur la production de ténébrions meuniers qui est moins coûteuse que le grillon, par exemple, et dont le goût varie d’un stade de croissance à un autre.

« Pour la production de masse, on y va avec la larve, appelée aussi le ver de farine, qui goûte les noix, la graine de tournesol. Il y a aussi les nymphes, c’est tendre, ça goûte le maïs », cite en exemple M. Girard. Ce dernier est en relation avec des chefs et l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec pour développer des projets.

10 TONNES PAR ANNÉE

Les propriétai­res de Tottem Nutrition sont en discussion pour installer la ferme de ténébrions meuniers à Laval d’ici la fin 2018. L’entreprise collabore avec le Centre de recherche agroalimen­taire de Mirabel (CRAM) afin de trouver les meilleurs moyens de maximiser l’élevage. Des chercheurs de l’Université McGill réfléchiss­ent aussi à un moyen d’automatise­r la production.

M. Girard espère produire 10 tonnes de ténébrions par année, assez pour développer ses propres produits et approvisio­nner d’autres entreprise­s québécoise­s. En ce moment, c’est l’ontarienne Entomo Farms qui fournit la plupart d’entre elles.

 ?? PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, AMÉLIE ST-YVES ?? Gabriel Dubois et Samuel Richard élèvent 35 000 vers de farine et 2000 ténébrions meuniers adultes dans un petit local à Louisevill­e. Quatre scorpions (dont un sur une main) y vivent aussi, car ils veulent faire des conférence­s dans des écoles.
PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, AMÉLIE ST-YVES Gabriel Dubois et Samuel Richard élèvent 35 000 vers de farine et 2000 ténébrions meuniers adultes dans un petit local à Louisevill­e. Quatre scorpions (dont un sur une main) y vivent aussi, car ils veulent faire des conférence­s dans des écoles.

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