Une femme pour redorer le blason de la GRC
Politologue, consultante internationale et conférencière On ne peut que se réjouir de la nomination, par le premier ministre Justin Trudeau, le 9 mars dernier, de la commandante Brenda Lucki, à la tête de la Gendarmerie royale du Canada, à titre de commissaire permanente.
C’est une première qui vient dépoussiérer l’une de nos plus vieilles institutions canadiennes, créée, au départ, par une loi fédérale, le 3 mai 1873, sous le nom de « police à cheval du NordOuest ».
La commissaire Brenda Lucki est une pionnière dans son domaine. Reconnue pour sa compétence, son leadership et sa sensibilité aux réalités autochtones, elle aura de grands défis à relever, dont celui de redorer le blason d’une organisation qui a camouflé, pendant des années, voire nié les inconduites sexuelles qui se pratiquaient dans ses rangs.
Des plaintes de harcèlement sexuel avaient été déposées, certaines remontant à une cinquantaine d’années, mais la loi du silence était assez épaisse pour les étouffer pendant si longtemps. Il a fallu attendre l’enquête menée il y a deux ans, pour que des mesures soient annoncées, en décembre 2017.
On y apprenait, entre autres, que la GRC avait reçu plus de 10 000 cas de signalements d’agressions sexuelles et que la moitié des dossiers classés sans suite, parce que considérés « sans fondements » présentaient suffisamment de matière à réexamen.
Ce n’est pas le seul scandale à ternir l’image de la GRC. Cette sale réputation va se prolonger à l’étranger quand deux policiers canadiens qu’elle avait déployés au sein des Casques bleus pour une mission de maintien de la paix seront accusés d’exploitation sexuelle par les Nations unies.
L’ONU FAIT APPEL AUX FEMMES
Le problème se pose aussi à l’international quand les forces de l’ordre, sous l’égide des Nations unies, censées assurer la protection et la sécurité des femmes les plus vulnérables dans les zones de conflits sont elles-mêmes accusées d’abus sexuel.
La situation est assez critique quand on sait que les guerres, les conflits et la persécution ont mis sur le chemin de l’exil, plus de 60 millions de personnes déplacées ou réfugiées dont la moitié sont des femmes.
J’ai à l’esprit la tragédie des femmes Yézidies qui ont été enlevées en Irak, en 2014, soumises aux pires atrocités, vendues sur les marchés publics comme du bétail et violées à répétition avant d’être offertes comme trophée de guerre aux combattants djihadistes de l’État islamique.
Selon l’ONU, une femme déplacée sur cinq a été victime de violences sexuelles dans les zones de conflits. D’où l’importance d’avoir des corps de maintien de la paix qui les protègent au lieu de les exploiter.
SUR LA SELLETTE
Or, depuis des années, le personnel de maintien de la paix de l’ONU est sur la sellette pour accusations d’abus sexuels à l’égard des femmes réfugiées. Le Secrétaire général avait même imposé un couvre-feu aux Casques bleus au Congo, pour les empêcher de sortir, la nuit.
En 2013, c’est la mission de maintien de paix au Mali (MINUSMA) qui a eu à faire face à ces accusations. La France l’a été, notamment en 2014, en Centrafrique.
En 2017, c’est le personnel du Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) qui a fait l’objet de plaintes de cette nature.
Là encore, comme pour la GRC, ce sont les femmes qui ont été appelées au secours. L’ONU recrute d’ailleurs de plus en plus de femmes dans ses missions de maintien de la paix.
Elle espère ainsi en faire des Brenda Lucki de l’action humanitaire, des « modèles » qui donneront d’elles une image plus rassurante pouvant sécuriser les femmes vulnérables et gagner leur confiance.