François trébuche sur le dossier de la pédophilie
En 5 ans de pontificat, le manque de poigne du pape dénoncé par les critiques
CITÉ DU VATICAN | (AFP) Le manque de poigne du pape François envers les prêtres soupçonnés d’avoir commis ou caché des agressions sexuelles sur mineurs a assombri sa cinquième année de pontificat, cap qu’il franchira demain sous le feu des critiques.
Réflexe de protection de l’Église? Mauvais conseillers ? Absence de stratégie ?
Les interrogations se sont multipliées après des paroles du pape laissant planer l’impression que la voix des victimes serait secondaire pour une Église raisonnant encore trop en vase clos. Son voyage, en janvier, au Chili, où l’athéisme se répand après des scandales étouffés de pédophilie, a constitué un échec retentissant.
François y a défendu avec force l’évêque chilien Juan Barros (soupçonné d’avoir tu les crimes d’un vieux prêtre pédophile), se déclarant persuadé de son innocence et demandant aux victimes présumées des preuves de culpabilité, avant de présenter des excuses pour ses propos maladroits et de dépêcher au Chili un enquêteur pour recueillir des témoignages.
« DÉFENDRE SON INSTITUTION »
« Cela fait partie de la nature humaine de défendre son institution. Au lieu d’apprendre des erreurs du passé, l’Église les répète dans chaque pays où éclate un scandale pédophile », déplore l’Irlandaise Marie Collins, une victime d’un prêtre pédophile.
Le pape s’était déjà sans doute montré trop miséricordieux pour Don Mauro Inzoli, surnommé « Don Mercedes » pour son goût du luxe. Le prêtre italien avait été réduit à l’état laïc par Benoît XVI, mais François avait atténué sa peine à « une vie de prière ».
Mais Don Inzoli a été condamné en juin à près de cinq ans de prison par l’Italie pour avoir abusé d’adolescents. Le pape l’a alors défroqué.
François, qui proclame comme son prédécesseur « la tolérance zéro » sur le sujet, était attendu sur des mesures concrètes.
Il a mis en place, en 2014, une commission internationale d’experts, chargée de propositions de prévention. L’initiative s’est toutefois retournée contre lui avec la démission des deux seuls membres représentant les victimes.
TRIBUNAL ?
Marie Collins avait ainsi claqué la porte en mars 2017, en dénonçant un manque de coopération « honteux » au sein du Vatican et en regrettant qu’un tribunal, annoncé par le pape en 2015, pour juger les prêtres pédophiles, soit resté lettre morte.
Le cardinal allemand Gerhard Müller, alors gardien du dogme, et écarté depuis, avait rétorqué que le tribunal ferait double emploi avec des instances existantes.
« Les paroles du pape sont bonnes, mais pas suivies d’actions », assène aujourd’hui Marie Collins, notant que les prélats ont « du mal à accepter des conseils extérieurs ». « Mon désespoir, c’est que les membres du Vatican n’ont pas encore compris comment leurs actions sont perçues en dehors de l’Église », dit-elle.