Privé de ses « patches » presque neuves
Un membre des Hells Angels se fait saisir sa veste à l’effigie du gang 11 mois après sa montée en grade
Un nouveau membre des Hells Angels de Montréal vient de subir l’affront de se faire confisquer ses « patches » presque neuves par la police au cours d’une enquête antidrogue.
Jean-Richard Larivière, surnommé « Race », avait reçu sa veste à l’effigie des Hells en mars 2017 après avoir été promu membre en règle du chapitre de Montréal.
Le mois dernier, l’Escouade nationale de répression contre le crime organisé (ENRCO) a saisi les « patches » — aussi appelées les « couleurs » — du motard de 50 ans en menant une perquisition dans un entrepôt sur la couronne nord, a appris Le Journal.
La veste y était remisée avec des vêtements portant l’inscription « Support 81 » et destinés à faire la promotion de la bande, qui sont également devenus des trophées de chasse des policiers.
Les autorités pourraient éventuellement en demander la confiscation définitive au tribunal. Des juges ont déjà statué dans le passé que ces vestes ornées de la tête de mort ailée des Hells constituent des « biens infractionnels » ayant servi à faciliter la commission d’actes criminels.
« ANGELS FOREVER... »
Contrairement à ses confrères qui préfèrent le cuir, Larivière était l’un des seuls Hells Angels à avoir choisi une veste en tissu de type « camouflage » pour y broder le logo du club, l’écusson du chapitre de Montréal, ainsi qu’un slogan qu’on ne retrouve pas souvent sur de telles « patches » : AFFA, pour « Angels Forever, Forever Angels ». Les policiers l’avaient déjà vu avec cette veste dans quelques rassemblements. Cette saisie s’inscrivait dans le projet d’enquête Objection, qui cible un vaste réseau de trafic de drogue lié à plusieurs membres influents des Hells.
Aucune accusation ne pèse sur Larivière ni sur aucun autre motard dans cette affaire. On sait cependant que le chef présumé de la bande, Mario Brouillette, et le doyen des Hells au Québec, Michel « Sky » Langlois, ont reçu la visite de l’ENRCO durant cette enquête, qui a aussi permis de saisir pour 3 M$ en drogue et en argent.
DES RÈGLES STRICTES
Chez les Hells, se faire saisir ses « couleurs » par la police est vu comme une insulte. « La “patch” des Hells Angels, c’est la pierre angulaire de l’organisation », avait témoigné le sergent Alain Belleau, expert de la SQ en matière de motards criminalisés, devant la commission Charbonneau.
Cela représente aussi une source d’embêtement pour le motard privé de sa veste emblématique.
D’abord, les règlements internes quasi militaires du club stipulent que tous les membres « sont obligés d’avoir leur veste », a insisté le sergent Belleau lors de ce témoignage, en 2013.
L’ennui, c’est qu’ils « n’ont pas le droit d’avoir plus d’une veste » en leur possession, a précisé ce spécialiste du renseignement criminel.
« Race » Larivière devra donc se commander un autre « set de patches » s’il veut participer aux rassemblements du gang, comme la « First Run », la première sortie en moto des Hells, au début de mai.
LOGO BRODÉ EN AUTRICHE
De plus, les Hells ne peuvent pas en obtenir « chez n’importe quel couturier », d’après le sergent Belleau, en spécifiant que le logo du club serait uniquement brodé en Autriche ou aux États-Unis. Pas ailleurs.
De plus, au Canada, il n’y a que les Hells de la Colombie-Britannique qui seraient autorisés à en commander. « On avait un catalogue et il fallait passer par eux pour en commander », a déclaré aux policiers Dayle Fredette, un ex-Hells Angel devenu délateur.
Ces deux délateurs de l’opération SharQc ont aussi identifié quelques Hells Angels québécois qui ont déjà été suspendus par leur bande après avoir perdu leurs « patches » dans des circonstances fortuites où la police n’était pas impliquée.