Poutine, encore et toujours
Les Russes votent aujourd’hui à travers leur immense pays, et leur choix ne fait aucun doute. Pour paraphraser Benjamin Franklin, il n’y a rien de certain dans ce monde, sauf la mort, les impôts… et l’élection de Vladimir Poutine à la présidence de la Russie. Préparons-nous à six autres années de provocations et d’efforts pour déstabiliser les démocraties occidentales !
Dix-huit ans déjà que l’ancien agent du KGB dirige la Russie et il continuera de le faire jusqu’en 2024. Impossible de prédire ce que donneront les six prochaines années en Occident, mais il est resté solidement en poste jusqu’à maintenant, pendant que Canadiens, Américains et Français changeaient, eux, quatre fois de dirigeants. En Italie, huit différents premiers ministres se sont succédé durant la même période… mais bon, l’Italie, c’est une autre histoire.
La réélection de Poutine est assurée non seulement parce qu’un des rares candidats pouvant lui livrer un bon combat – le jeune et charismatique Alexeï Navalny – a été exclu de la liste électorale à cause d’une douteuse condamnation judiciaire, mais aussi parce que les Russes, historiquement, malgré l’illusion créée par la révolution bolchevique, sont réticents au changement.
Un des derniers sondages de la campagne présidentielle accorde 69 % des intentions de vote à Vladimir Poutine, plus de deux votes sur trois ! Preuve qu’il n’a rien à craindre de l’opposition, le candidat du Parti communiste, Pavel Groudinine, en deuxième place, ne devrait recevoir que 7 % des voix. Pas de recomptage en vue, c’est sûr !
UN FAIBLE POUR VLADIMIR
Ce qui reste renversant, vu de Washington, c’est la mollesse avec laquelle Donald Trump traite Vladimir Poutine. Lui, si fanfaron lorsque décrivant ses adversaires démocrates, n’a toujours pas trouvé de bonnes raisons pour critiquer le maître du Kremlin.
Son équipe en a conscience et sert constamment des exemples – comme les dernières sanctions pour ingérence dans le processus électoral américain – pour montrer que cette Maison-Blanche a effectivement une colonne vertébrale lorsque vient le temps de répondre aux affronts de Moscou.
Ils ont beau faire, ça ne convainc pas. Il s’agissait de voir le président américain, jeudi, dans le Bureau ovale où il accueillait le premier ministre irlandais pour la Saint-Patrick. Alors que les Britanniques et leurs alliés européens condamnent Moscou avec vigueur et assurance à la suite de l’empoisonnement d’un ancien espion russe en Angleterre, Trump, interrogé sur le sujet, n’a pu répondre qu’un faiblard : « Il semble bien que ce sont les Russes. » Ils ont dû frissonner au Kremlin.
TOUS CONTRE NOUS
D’ailleurs, ces condamnations occidentales après l’attaque contre Sergueï Skripal, l’ancien espion empoisonné, ne pouvaient pas mieux tomber pour Poutine. Elles ont renforcé le message qu’il répète depuis des années : tout le monde est contre nous ; la Russie est assiégée ; il faut un leader fort pour le pays.
Vladimir Poutine, en fait, n’est rongé que par une seule crainte : la participation des électeurs. Faute de candidats d’opposition crédibles et non discrédités par la propagande du Kremlin, il ne reste aux Russes, pour manifester leur désaccord, que de ne pas se rendre aux bureaux de vote. Les médias locaux ont d’ailleurs concocté une formule pour résumer ce scrutin, 70-70 : 70 % de participation, 70 % des voix à Poutine.
Il ne s’agira pas tant de savoir demain qui les électeurs russes auront choisi comme président, mais combien d’entre eux sont restés au chaud dans leur appartement ou leur datcha au lieu d’aller plébisciter le nouveau tsar de toutes les Russies. Ne rien choisir en Russie reste encore le choix le plus audacieux.