Youhou, Ariel !
Je suis obsédée par la photo d’Ariel Jeffrey Kouakou prise devant de jolies décorations de Noël, avec son pantalon et son noeud papillon rouges et ses chaussures noires bien cirées. Souriant, fier, il se tient droit. Cet enfant est aimé.
Malgré cet amour, des autobus de bénévoles, des policiers à pied, en VTT et à cheval, qui le cherchent sans répit, le mystère le plus opaque flotte toujours autour de sa disparition.
Je ne connais personne qui n’ait pas la gorge nouée en pensant à cet enfant aux yeux illuminés par l’innocence et à ses parents démolis. Son père se dit prêt à pardonner à un éventuel ravisseur. Cet homme a plus belle âme que la mienne.
L’ABÎME
On ne peut pas imaginer la douleur que ressentent les proches d’Ariel. L’horreur pure, indicible s’est faufilée dans leur maison et a pris possession de leur vie. Vous savez comment on se sent au réveil après une rupture ? Les parents d’Ariel eux sont assaillis à chaque réveil par le souvenir que la chair de leur chair manque à l’appel.
Quel parent ne ressent pas la pointe du couteau de l’angoisse qui s’enfonce lentement dans sa poitrine quand son enfant est légèrement en retard après l’école ? Imaginez six jours.
Comment font-ils pour ne pas perdre la raison ?
Il n’y a pas si longtemps, nous cherchions Athena Gervais. Si Vous existez Vous en haut, Vous ne pourriez pas faire en sorte que les choses se terminent autrement cette fois ? En fait, comment pouvez-Vous, Vous, le Tout-Puissant, permettre que des enfants soient enlevés à leurs parents ? C’est pousser le « Venez à moi les petits enfants » de l’Évangile un peu loin, non ?
Allez, un effort, Ariel, c’est le nom d’un ange.
Malgré la peine, il faut mettre notre imagination en veilleuse pour faire vivre l’espoir de le retrouver sain et sauf. À ce moment seulement, le Québec en entier poussera un grand « ouf ! » collectif.
NOIR, ARIEL ?
Un avocat chroniqueur au Devoir affirmait vendredi qu’un « enfant de dix ans disparu qui se trouve à être noir ne peut pleinement bénéficier du soutien élémentaire que mérite un enfant de dix ans disparu. » Cette affirmation qui m’a choquée faisait référence, me dit-il, aux « internautes qui formulent à son égard des remarques racistes… », soit la phrase suivante.
J’ai peine à imaginer que des commentaires d’internautes puissent constituer une forme de « soutien élémentaire » quand disparaît un enfant. Je veux bien croire à bonne foi du chroniqueur, mais je ne peux établir spontanément un lien entre le traitement « différencié » accordé à Ariel et les commentaires de trolls qui s’expriment à travers des identités volées.
Vous êtes le seul, Monsieur Fabrice Vil, qui a souligné qu’Ariel est noir et que ça compte.
Cela en adéquation avec votre façon de combattre le racisme : « … la lutte à la discrimination elle-même n’implique pas qu’on traite tout le monde de la même façon », écrivez-vous dans votre chronique. « Pour garantir les mêmes droits fondamentaux à tous, il ne faut pas traiter tout le monde également. »
Propos étonnants de la part d’un avocat.