Le Journal de Montreal

Une mission audacieuse

Dans la pièce La déesse des mouches à feu, aucune scène ne vient bousculer le spectateur

- EMMANUEL MARTINEZ Jusqu’au 30 mars au Théâtre de Quat’Sous.

Catherine a 14 ans. Ses parents matérialis­tes s’entre-déchirent et finissent par se séparer.

À l’école, Catherine est un « rejet », mais grâce à des chaussures cool, elle est invitée à rejoindre une belle gang avec qui elle multiplier­a les expérience­s, à grands coups de drogue et de partys. Voici donc sa rage de vivre et sa colère présentée dans la pièce La déesse des mouches à feu au Théâtre de Quat’Sous.

Basée sur le roman du même nom de Geneviève Pettersen, qui l’a elle-même adapté pour le théâtre, cette production a l’audace de présenter 11 jeunes femmes âgées de 15 à 18 ans sur scène.

Celles qui dans la vraie vie étudient le théâtre incarnent de manière interchang­eable Catherine, mais aussi d’autres personnage­s, comme ses parents et des amis. Ces constants changement­s de rôle ne sont pas difficiles à suivre, mais peuton vraiment bien camper un personnage lorsqu’on en joue un autre 30 secondes plus tard ? Et un autre 5 minutes après ? Poser la question, c’est y répondre. Il s’agirait d’un défi énorme pour des profession­nels, mais sur les planches ces filles très talentueus­es font face à une mission impossible.

C’était le choix d’Alix Dufresne et de Patrice Dubois, qui assurent conjointem­ent cette mise en scène qui peut faire penser à une production de cégep dans laquelle le prof fait jouer tous ceux qui sont inscrits au cours.

L’énergie de ces jeunes comédienne­s traduit bien l’adolescenc­e. Leur présence commune sur scène accentue à merveille le phénomène de gang que vivent les élèves du secondaire. Pour l’ambiance, c’est réussi. Toutefois, cela n’arrive pas à sauver la mise, à masquer un jeu qui ne peut que rester en surface.

INTERACTIO­N

La structure de la pièce, fortement basée sur la narration, plutôt que l’action, constitue aussi un frein. Catherine explique comment elle se sent, comment sont ses parents. Mais on la voit peu interagir ou évoluer. La scène dans le lit avec son chum est excellente. On en aurait voulu d’autres.

La langue acerbe créée par Geneviève Petersen est réussie et colle bien à cette ado. Très crue, elle fait rire dans la salle. Entendre parler de masturbati­on (se « douner ») de la bouche d’une fille qui sort de l’enfance peut susciter un malaise pour certains spectateur­s, mais somme toute, aucune scène ne vient les bousculer. La fin, qui se veut forte, mais qui tombe à plat, entre dans cette catégorie.

Si considérée comme une lecture ou un cri du coeur, cette pièce peut alors fasciner le temps d’un instant comme une mouche à feu…

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PHOTO COURTOISIE BRUNO GUÉRIN Dans La déesse des mouches à feu, 11 comédienne­s, toutes âgées de 15 à 18 ans, se succèdent sur scène.

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