OTTAWA NÉGLIGENT AVEC VOS RENSEIGNEMENTS PERSONNELS
Le gouvernement fédéral est incapable de protéger les informations privées des Canadiens
Les informations personnelles de centaines de milliers de Canadiens détenues par Ottawa pourraient s’être retrouvées entre de mauvaises mains l’an dernier à cause de la négligence du gouvernement fédéral. Une situation qui en choque plusieurs.
« Je suis extrêmement perturbé par le nombre de brèches dans la vie privée des Canadiens au gouvernement fédéral, s’insurge le député néo-démocrate ontarien Charlie Angus. Et je suis tout aussi choqué par sa tendance à camoufler ces brèches. »
Des documents obtenus par M. Angus et consultés par Le Journal démontrent que le fédéral peine à conserver loin des regards indiscrets des renseignements personnels de citoyens. Au total, environ 250 000 Canadiens ont été victimes de ces failles depuis janvier 2017.
L’Agence du revenu, par exemple, a perdu la trace d’informations confidentielles de plus de 21 000 contribuables. Postes Canada a de son côté égaré plus de 400 passeports (voir ci-contre).
Ironiquement, même l’agence d’espionnage électronique canadienne n’est pas à l’abri des incidents de sécurité. Une brèche a été ouverte lorsqu’un employé du Centre de la sécurité des télécommunications s’est fait voler du matériel appartenant à son employeur.
Dans d’autres cas, les problèmes sont moins graves, comme des envois massifs de courriels dans lesquels le nom et l’adresse des destinataires n’ont pas été cachés aux récipiendaires.
Au ministère des Anciens Combattants, la majorité des atteintes à la vie privée sont dues à du courrier envoyé à la mauvaise personne.
« INCOMPÉTENCE » ET « NÉGLIGENCE »
Selon un professeur de criminologie à l’Université Laval, la sécurité des données n’est tout simplement pas une priorité pour la plupart des gouvernements. À cela s’ajoutent « l’incompétence » et la « négligence » des fonctionnaires.
« C’est inquiétant, tranche Stéphane Leman-Langlois. Le gouvernement devra faire des efforts surhumains pour améliorer la sécurité alors que nos données personnelles fuient de plus en plus sur internet », ajoute-t-il, citant le scandale impliquant Facebook qui fait rage actuellement.
Le Commissariat à la protection de la vie privée soutient que les façons de faire du fédéral ne sont « pas toujours adéquates ».
« Au cours des dernières années, le Commissariat a été témoin de nombreux cas d’atteintes à la vie privée importantes », selon sa porte-parole, Tobi Cohen.
Le chien de garde estime aussi qu’il n’a pas « un portrait global de la situation » parce que les ministères ont tendance à garder pour eux certains de leurs écarts de conduite.
« Nous soupçonnons que nous ne sommes pas avisés de toutes les atteintes qui devraient nous être signalées. »
PAS SOUVENT DÉNONCÉES
Le député Angus est aussi scandalisé de voir que très peu de brèches sont rapportées au chien de garde de la vie privée des Canadiens. Selon ses calculs, seulement 4 % des incidents se retrouvent sur le bureau du Commissaire.
Celui-ci exige que les ministères lui rapportent les failles « substantielles », soit celles qui « pourraient causer un dommage ou un préjudice grave » aux personnes touchées.
Tous les organismes fédéraux ont assuré prendre très au sérieux la protection des informations. À ce jour, Ottawa estime qu’aucune brèche n’a servi à des activités criminelles.
LE JOURNAL | Après des jours de polémique autour de l’utilisation de données personnelles de millions d’utilisateurs et faisant face à une campagne de désabonnements, le patron de Facebook est enfin sorti de son long silence, hier, reconnaissant des « erreurs ».
Dans ses premiers commentaires sur la controverse entourant la firme Cambridge Analytica, Mark Zuckerberg s’est dit « responsable de ce qui se passe » sur Facebook et a promis aux usagers de mieux contrôler l’utilisation de leurs données personnelles collectées par son entreprise, sans explicitement s’excuser.
« Il y a encore à faire, nous devons aller plus vite et le faire », a-t-il écrit aux plus de deux milliards d’usagers du réseau social, mais aussi aux actionnaires qui encaissent de lourdes pertes financières.
« Nous avons la responsabilité de protéger vos données et si nous ne pouvons pas le faire, nous ne méritons pas de vous servir », a-t-il avoué, ajoutant que le groupe allait examiner de près les applications présentes sur Facebook.
Le fondateur se dit persuadé que des groupes malintentionnés tentent présentement d’utiliser Facebook pour influencer les élections américaines de mi-mandat qui doivent avoir lieu en novembre.
« Je suis sûr qu’il y a une version 2.0 de ce que les Russes ont essayé de faire en 2016 et nous devons être sûrs de détecter ces nouvelles tactiques et de nous y opposer », a-t-il déclaré dans une entrevue sur la chaîne CNN hier.
MOINS D’ACCÈS
Les applications douteuses ou dont les développeurs refusent de se soumettre aux investigations du groupe seront bannies, a affirmé M. Zuckerberg. Les applications tierces auront désormais accès à moins de données, se contentant du nom, de la photo de profil et de l’adresse courriel de l’utilisateur.
Facebook se trouve au coeur d’un scandale retentissant et est visé par des enquêtes et des plaintes des deux côtés de l’Atlantique, après la révélation le week-end dernier que Cambridge Analytica avait utilisé des données personnelles de 50 millions d’utilisateurs à des fins politiques.
Mark Zuckerberg a dit qu’on avait assuré à Facebook en 2015 avoir effacé ces données, mais que cela s’est ultérieurement révélé faux.
DÉSABONNEMENT COMPLEXE
Devant l’appel de nombreux internautes à quitter le réseau social, plusieurs sites ont proposé des astuces pour se désabonner, avertissant que le processus est beaucoup plus complexe qu’il y paraît, alors que la suppression définitive d’un compte Facebook peut prendre jusqu’à 90 jours.
Il existe l’option de « désactiver » son compte, qui le suspend temporairement. Le journal de l’utilisateur ne sera plus disponible, mais certaines informations comme les messages envoyés resteront visibles.
Pour les utilisateurs qui optent pour « supprimer », ils ne pourront plus réactiver leur compte, mais les messages envoyés resteront accessibles.