Vaste frappe contre le tabac illégal
Le trajet emprunté par les contrebandiers passait par les États-Unis et l’Ontario avant de revenir au Québec
On recharge la remorque, mais cette fois-ci avec du tabac de contrebande.
Un réseau de contrebandiers de tabac dont les marchandises transitaient sur plus de 3000 km à travers le Canada et les États-Unis et qui permettait à la mafia italienne de s’en mettre plein les poches a été démantelé hier par la Sûreté du Québec.
Une dizaine de frappes simultanées ont été réalisées aux aurores hier à Montréal, sur la Rive-Nord et en Ontario. Il s’agissait de la dernière étape de l’opération Olios, amorcée il y a 18 mois.
La mafia sera ainsi privée d’une importante source de revenus, considérant qu’elle a empoché 7,3 millions $ en moins de deux ans grâce à ce vaste stratagème. Celui-ci représente une fraude de 208 millions $ pour les deux paliers de gouvernement, selon la police provinciale.
Au total, 14 personnes qu’on soupçonne d’être impliquées dans cette fraude ont été interpellées hier matin. Parmi elles, on retrouve la présumée tête dirigeante du réseau, Domenico Agostino, ainsi que son complice Domenico Cocullo.
Les hommes de 48 et 39 ans sont des proches de la mafia italienne, plus particulièrement du clan calabrais, selon nos informations.
Ce sont eux qui auraient assuré le pont entre le transporteur de tabac, soit l’entreprise BSF Transport, basée à Notre-Dame-de-Lourdes, près de Joliette, et la mafia. Plusieurs véhicules appartenant à la compagnie ont été saisis lors des perquisitions d’hier matin.
UN LONG PARCOURS
Avec la preuve récoltée jusqu’à présent, les enquêteurs ont été en mesure de retracer le trajet de plus de 3000 kilomètres établi par les fraudeurs afin de faire entrer d’énormes quantités de tabac de contrebande au Québec.
Pour y arriver, Domenico Agostino et ses bras droits auraient d’abord approché BSF Transport, qui possède les licences pour effectuer du transport en vrac aux États-Unis.
Une entente aurait par la suite été conclue afin que les chauffeurs se rendent jusqu’en Caroline du Nord pour aller chercher le tabac.
« En ce qui a trait au tabac de contrebande, la Caroline du Nord, c’est à peu près comme la Colombie avec la cocaïne, illustre le lieutenant Dany Dufour, chef du service des enquêtes sur la criminalité contre l’État à la Sûreté du Québec [SQ]. C’est vraiment la place. »
Les cargaisons étaient ensuite ramenées dans des usines de transformation de tabac de Kahnawake, une réserve près de Châteauguay.
PLUS RAFFINÉ
Selon le lieutenant Dufour, les stratagèmes en matière de tabac de contrebande se sont nettement raffinés depuis les dernières années.
Dans l’espoir de brouiller les cartes, le crime organisé tente d’étendre ses tentacules sur des territoires de plus en plus larges. Et ils sont prêts à mettre les efforts nécessaires, puisque l’importation du tabac illégal est huit fois plus lucrative que la cocaïne, assure le lieutenant Dufour.
Malgré une ruse bien planifiée, une étroite collaboration entre la SQ, la police provinciale de l’Ontario, l’Agence des services frontaliers ainsi que le département de la Sécurité intérieure des États-Unis (Homeland security) a permis aux autorités de démanteler le réseau.