Le Journal de Montreal

Price : réalité ou fiction ?

- YVON PEDNEAULT yvon.pedneault@quebecorme­dia.com

Au moins, Claude Julien l’admet. Carey Price ne connaît pas une saison correspond­ant aux standards qu’il a établis au cours de sa carrière.

Pour amenuiser la portée de ses propos, l’entraîneur du Canadien s’est empressé de faire un parallèle avec Braden Holtby, le gardien des Capitals de Washington, qui lui aussi éprouve de sérieux ennuis au point qu’on se demande si Philipp Grubauer ne sera pas le gardien partant à la mi-avril.

Julien poursuit en disant que Price sera de retour en bonne forme la saison prochaine, qu’il n’est pas inquiet du tout.

OK. Des propos qu’un entraîneur doit tenir dans un tel contexte.

Mais, entretient-il les mêmes sentiments quand il discute avec ses adjoints, avec l’entraîneur des gardiens et surtout avec son directeur général ?

Certes, on s’en remet toujours à la bonne théorie qu’un gardien ne peut pas perdre tous ses attributs, comme ça, en faisant cliquer les doigts. On veut bien se convaincre que Price va changer à nouveau la donne, l’hiver prochain. Mais, pour l’instant, ce que l’on voit sur la patinoire, c’est insensé.

En l’espace d’une saison, on ne devient pas un gardien ordinaire, très ordinaire même, 11 buts sur 64 tirs lors de ses deux derniers matchs, donc, on ne sombre pas dans la médiocrité du jour au lendemain après avoir été le meilleur de la planète pendant plusieurs saisons. Il reste que c’est inquiétant.

Price n’intimide plus personne.

UNE DÉFENSE SABOTÉE

Il ne parvient plus à corriger les erreurs de ses coéquipier­s, ce qu’il faisait si bien. À cet égard, je concède que les défenseurs devant lui multiplien­t les erreurs et cette défense sabotée par Marc Bergevin a besoin d’un changement d’identité.

Mais, ça va au-delà de tout ça. Que Price jouisse de certains privilèges, ça ne me dérange pas. Dans toutes les équipes, il y a des joueurs qui ont des statuts bien particulie­rs. Price en est un. Mais ces privilèges deviennent une source de distractio­n quand le principal intéressé ne manifeste aucun leadership alors qu’il devrait se démarquer du groupe.

Ces privilèges deviennent une source de distractio­n et aussi une source d’inquiétude quand le principal intéressé manifeste un désintéres­sement vis-à-vis une situation pour le moins déplorable.

Il devrait être un gladiateur. Il devrait à l’occasion secouer le groupe. C’est vrai qu’il ne montre pas les statistiqu­es pour faire la leçon aux autres, par contre, c’est le joueur d’exception et il doit réagir en conséquenc­e. Dans les faits, c’est son équipe. Or, que fait-il pour améliorer la situation ?

SUIVRE LA TENDANCE

C’est ce qui devrait inquiéter les décideurs du Canadien. En surface, puisqu’on ne sait pas tout ce qui se passe dans un vestiaire, on a l’impression que Price suit la tendance. Mais, une organisati­on ne paie pas un athlète 10,5 M$ par saison pour suivre la tendance. On lui demande d’être au sommet de sa profession, d’être aussi le grand leader de son groupe, de ne pas accepter les demi-mesures. Or, ce n’est pas le cas. Bien au contraire. On ne voit pas ce gardien provocateu­r. Il a mis un peu de moutarde sur deux tirs des Capitals, ce qui a entraîné le petit numéro de TomWilson après qu’il eût marqué un but, une imitation du gardien, mais il a concédé six buts.

Dans 17 de ses 44 matchs, il a alloué quatre buts et plus. Ce ne sont pas les statistiqu­es d’un gardien de concession. Ce sont des statistiqu­es qu’on peut découvrir chez un gardien auxiliaire ayant du mal à conserver son poste avec une moyenne de buts alloués de 3,10 et une moyenne d’efficacité de ,901.

Oui, oui, d’accord, il a devant lui une défense épouvantab­le.

Mais, cette défense aurait apprécié un coup de main de la part du gardien ? Ça ne s’est pas produit.

Price a été incapable de s’ajuster à une bien triste réalité, on le reconnaît, mais c’est justement dans l’adversité que les meilleurs font la différence. L’indifféren­ce n’a pas sa place dans une telle situation.

MODIFIER LE MODÈLE D’AFFAIRES ?

Quand viendra le temps d’appliquer le plan, Marc Bergevin devra peut-être retourner devant son président et lui expliquer qu’il doit modifier certains points du modèle d’affaires.

Dans le sens que peut-être devra-t-on revoir le statut du gardien.

Qu’il ne devrait peut-être pas profiter d’une certaine immunité.

Mais, y a-t-il une organisati­on prête à courir le risque de dépenser 84 M$ pour un gardien qui laisse des indices inquiétant­s sur les prochaines saisons ? Pour le moment, il y en a une. Le Canadien et le nom de Price, comme je vous le précisais plus tôt la semaine dernière, est bien inscrit en caractère gras dans le plan.

On doit sûrement se croiser les doigts et espérer.

Espérer que la situation revienne comme il y a quelques saisons.

Que le gardien s’affichera comme le meilleur joueur de l’équipe.

On prend une longue respiratio­n…

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