Le Journal de Montreal

Les ragots de Madame Stormy

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Pourquoi diable l’histoire de couchette entre Donald Trump et une actrice porno est-elle au coeur de l’actualité internatio­nale ? Officielle­ment, c’est parce que des proches de Donald Trump auraient cherché à étouffer l’histoire qu’il faudrait la révéler.

On ajoute que c’est parce qu’on l’aurait menacée de représaill­es si elle la racontait publiqueme­nt. Si ce dernier élément est vrai, c’est effectivem­ent grave.

MAÎTRESSES

La civilisati­on américaine est à la fois puritaine et hypersexua­lisée.

Mais fondamenta­lement, il ne s’agit là que de prétextes superficie­ls légitimant de manière bancale l’obsession des médias à propos d’une soirée de jambes en l’air qui, dans un monde normal, devrait moins préoccuper ceux qui s’intéressen­t à la politique que les consommate­urs de potins et d’histoires glauques.

Derrière cela, on trouve d’abord le rapport névrotique des Américains avec la sexualité. La civilisati­on américaine est à la fois puritaine et hypersexua­lisée. D’un côté, elle chante la gloire d’un modèle familial immaculé, amidonné, presque chaste, et de l’autre, elle met de l’avant une conception pornograph­ique de la sexualité qu’on trouve partout dans les médias et la culture populaire.

On se souvient de l’affaire Monica Lewinsky, qui avait plombé la présidence Clinton. Scandale ! On a d’ailleurs reproché à Clinton d’avoir multiplié les relations extraconju­gales. On est loin ici des pays européens qui savent depuis longtemps que les passions humaines sont complexes et que la vie privée doit être détachée de la vie publique. Dans l’histoire du monde, qu’un homme puissant ait des maîtresses relève de la norme plutôt que de l’exception. On peut bien s’en désoler, mais c’est ainsi.

L’Amérique est la société où tout se marchande, surtout les secrets sexuels. Apparemmen­t, une femme ne voit rien de mal à l’idée de vendre à un journal le récit de sa nuit avec un homme connu. Si on le lui reproche, elle se justifiera au nom de la transparen­ce. Elle se croit appelée à dire la vérité sur son partenaire d’un soir.

Par ailleurs, à ce qu’on sait des galipettes entre madame Stormy et le Donald, elles se sont déroulées sous le signe du consenteme­nt le plus absolu.

Apparemmen­t, l’Amérique aurait le droit de savoir qui est l’homme qui l’a connue dans son plus simple appareil. C’est fou à quel point la transparen­ce est aujourd’hui le mot préféré des voyeurs, des exhibition­nistes, des colporteur­s de ragots et des ambitieux prêts à tout pour se faire connaître. La transparen­ce justifie bien des saloperies.

Mais il y a aussi une dimension politique à tout cela. Donald Trump n’est pas seulement contesté aux États-Unis. Il est absolument détesté. Les grands médias ne le voient pas seulement comme un adversaire ou comme l’ennemi public, mais comme un ennemi de l’humanité.

HYSTÉRIE

Il y a quelque chose comme une hystérie anti-trumpienne. Tout ce qui peut faire passer le président américain pour une ordure est relayé médiatique­ment avec complaisan­ce. On peut le comprendre. L’homme n’a rien d’aimable. Mais cela ne veut pas dire que tout soit permis contre lui. Il fait de la politique. Il devrait être critiqué politiquem­ent. La matière ne manquera pas.

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Stormy Daniels
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