Le Journal de Montreal

Un trop-plein d’honnêteté

- RICHARD LATENDRESS­E richard.latendress­e@quebecorme­dia.com

On ne nous cache plus rien. La fessée de Donald Trump avec un magazine où il triomphait à la une, c’est enregistré ! Le fait troublant que deux fois plutôt qu’une, il a comparé la playmate avec laquelle il entretenai­t une relation extraconju­gale et l’actrice porno avec qui il a eu un fling d’après-midi à sa fille Ivanka, tout le monde est au courant. C’est clair, plus personne ne se garde de petite gêne.

Surtout, ne me prenez pas pour plus pudique que je suis. J’ai regardé les interviews de Karen McDougal et de Stormy Daniels autant pour en savoir plus sur la personnali­té du président américain que dans l’attente inavouée de descriptio­ns grivoises de la part d’une habituée du Playboy Mansion et d’une femme qui a fait carrière à se mettre à poil… et plus encore.

Sarah Sanders, la secrétaire de presse du président, une fois n’est pas coutume, a bien résumé l’impact pernicieux de ce saupoudrag­e de détails sur les condoms que n’utilise pas Donald Trump et les lits différents dans lesquels lui et Melania couchent : on en oublie qu’à travers tout cela, il a une superpuiss­ance à gérer.

LA PRÉSIDENCE EN SIDELINE

Sanders, en louangeuse-en-chef, ne s’est pas contentée de rappeler que Trump « a un pays à diriger », mais qu’il « fait une superbe job en plus ». Tout le monde est loin d’être de cet avis, comme le montre le dernier sondage de CNN : 54 % des Américains interrogés désapprouv­ent son travail, une majorité ! Pourtant, ce n’est pas si mal.

À 42 % au mois de mars, son taux d’approbatio­n reste historique­ment bas. Il est néanmoins en hausse de sept points par rapport à février. Les sondeurs rappellent aussi à tous ceux qui se réjouissen­t de son impopulari­té qu’il se situe à peine quatre points plus bas que Ronald Reagan et Barack Obama au même moment de leur présidence. Ce ne sont d’ailleurs pas ces chiffres-là qui me font réagir. C’en est un autre, beaucoup plus gros : 86 %. 86 % des électeurs républicai­ns, contre vents et marées, continuent d’apprécier ce qu’il fait. Ça décroche la mâchoire. Rien ne les trouble : ni le chaos à la Maison-Blanche, ni le va-et-vient de ses principaux conseiller­s, ni le limogeage des membres de son gouverneme­nt à coups de tweets, ni l’enquête qui démontre chaque jour un peu plus comment des Russes (jusqu’au Kremlin ?) ont semé la pagaille au sein de l’électorat américain pendant la dernière élection présidenti­elle pour lui faciliter le chemin vers la Maison-Blanche et finalement, pas même ces révélation­s embarrassa­ntes de playmate et de porn star.

LA FOI AVEUGLE

Miguel Marquez de CNN est allé se promener au cours des derniers jours dans l’ouest du Missouri, à la frontière du Kansas, le Trump Country dans toute sa splendeur. Il y a entre autres recueilli le témoignage de Pam Meadows, une professeur­e de piano qui se décrit comme une femme religieuse, qui a voté pour Trump et qui aime tout ce qu’il a fait jusqu’à maintenant : « Je n’ai pas voté pour un pasteur. Je ne voudrais pas qu’il influence ma famille en matière de moralité. Ce n’est pas, de toute façon, ce qu’un président est supposé faire. »

C’est ce qui nous échappe, je crois. L’électorat de Trump savait très bien en novembre 2016 à qui il donnait son vote. Rien, du coup, n’étonne ces électeurs dans les histoires qui sortent aujourd’hui. Les détails sordides, les commentair­es disgracieu­x, les confession­s osées, c’est à nous à nous y faire.

86 % DES ÉLECTEURS RÉPUBLICAI­NS, CONTRE VENTS ET MARÉES, CONTINUENT D’APPRÉCIER CE QU’IL FAIT.

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PHOTO AFP Malgré les récents scandales, la cote de popularité du président Donald Trump a gagné sept points par rapport à un sondage identique de CNN en février dernier.
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