La nostalgie des « fifties » s’empare de la Maison-Blanche
Son médecin nous l’avait décrit comme increvable. Une pièce d’homme équipé de gènes exceptionnels et d’un tempérament lui permettant d’échapper aux rides et aux tourments : il se couche le soir avec le poids du monde sur les épaules et se réveille le lendemain matin en recommençant à zéro, ou presque. Sauf que Donald Trump paraît chaque jour un peu plus ses 71 ans.
Les mauvaises langues diront qu’il n’a plus sa tête ; d’autres, tout aussi méchantes, souligneront qu’il n’a surtout pas le body… présidentiel, si on prend Barack Obama pour référence. C’est d’une autre façon que je le sens dépassé, le Donald.
Il continue, de manière très large avec son programme politique et les décisions qui sont prises un peu partout dans son administration, à s’adresser à un électorat qui triomphait il y a soixante ans : les travailleurs blancs avec à peine un diplôme d’études secondaires en poche, religieux et vieillissants.
Prenez les droits de douane imposés aux importations d’acier et d’aluminium aux États-Unis. Le président les présente comme nécessaires pour retrouver la « grande époque industrielle américaine ». Ils sont pourtant partis ces emplois-là et même Pittsburgh leur a tourné le dos, valorisant plutôt l’éducation et de la santé.
LES « GUEULES NOIRES », LA BELLE ÉPOQUE ?
Donald Trump a sorti les États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat pour, entre autres, ranimer l’industrie américaine du charbon. Le charbon, encore une fois, c’est une autre époque, une autre énergie, polluante et incompatible avec les connaissances et les sensibilités modernes à l’égard de la santé. Il faut être un indécrottable nostalgique pour vouloir plus de mineurs du charbon et leurs problèmes pulmonaires chroniques.
La révision des normes de consommation d’essence des voitures fabriquées aux États-Unis s’inscrit dans la même logique. On peut prétendre chercher à se débarrasser d’une réglementation trop contraignante, trouver que 54 milles au gallon, c’est exagéré, que ce sont les consommateurs qui en payent le prix, mais la conséquence, ce sera quoi ? De grosses bagnoles, dévoreuses de carburant… comme dans les années 50 quand « le gaz était 25 cents le gallon ». Ma mère m’en parle encore.
Un autre exemple ? La volonté de réintroduire, dans le recensement de 2020, une question, disparue depuis des décennies, sur la citoyenneté du répondant. Vous êtes d’ici ou d’ailleurs ? Légal ou non ?
Le recensement est censé compter tous les êtres humains sur le territoire américain. Vous pensez que les clandestins vont y répondre à ce questionnaire. Qu’est-ce que ça donnera, vous croyez ? Des résultats où, comme par hasard, il y aura moins de latinos et où la majorité blanche pourra jouir un plus longtemps de son statut dominant.
PAS DE COULEUR, PLEASE !
D’ailleurs, la politique d’immigration du président Trump, c’est aussi un retour en arrière : bloquer l’invasion latino venant du sud, stopper l’arrivée des musulmans et réduire le nombre des réfugiés venant, trop souvent bien sûr, de « pays de merde ». L’impact sur le look de l’Amérique ? Un peu moins foncé, un peu plus blanchâtre.
Soyons francs, personne ne devrait être surpris que les États-Unis soient engagés sur cette voie. Qu’attendre d’autre d’un slogan comme « Make America Great Again! » Si le pays a perdu de sa grandeur, il faut la retrouver quelque part dans un quelconque passé glorieux.
Ce qui étonne, c’est que chaque ministère, chaque agence, travaille dans ce sens. Un travail de fond qui ne paraît pas toujours, mais qui laisse sa marque. Donnez encore une trentaine de mois à ce premier mandat de Trump, puis – qui sait ? – un autre quatre ans et on va réécouter Elvis comme en 1955 !
L’impact sur le look de l’Amérique ? Un peu moins foncé, un peu plus blanchâtre.