« Je l’aimais comme un fils »
François Duguay se relève lentement de la mort de son protégé David Whittom
QUÉBEC | Près d’un mois après la mort de son protégé David Whittom dans un hôpital de Fredericton, l’entraîneur François Duguay admet que les événements qui se sont déroulés lors de la soirée du 27 mai dernier l’ont changé à jamais.
Lors d’un combat pour le titre canadien des lourds-légers, Whittom (12-24, 8 K.-O,) s’était incliné par knock-out technique au 10e round devant Gary Kopas. Victime d’une commotion cérébrale au terme du duel, le pugiliste de Québec avait été admis d’urgence à l’hôpital de Fredericton où il était tombé dans le coma pendant une période de trois mois.
À son réveil, en août, Whittom était dans un état végétatif, mais il a poursuivi son ultime combat pendant six autres mois. Il est finalement mort le 16 mars en raison des complications liées à une pneumonie.
Durant cette bataille, plusieurs amateurs et observateurs ont lancé la pierre en direction de Duguay en l’accusant d’avoir permis à Whittom de remonter sur le ring une fois de trop. Certains le tenaient même responsable de la mort du pugiliste.
« Certains m’ont dit que c’est moi qui l’avais tué, a souligné François Duguay lors d’une entrevue avec Le Journal de Montréal. La mère, le père et la soeur de David m’ont toutefois dit que David aurait fait le combat avec ou sans moi. Ils étaient contents que ce soit moi qui avais été là pour ce duel.
Je l’aimais comme un fils, mais je pouvais le haïr comme un oncle. Il m’en a fait vivre des affaires. À la fin, il avait remis de l’ordre dans sa vie et j’étais tellement content que ça aille bien pour lui. Il l’avait eu très dur et il a toujours été un fighter. C’était sûr qu’il allait se garder un petit combat pour la fin. »
UN TESTAMENT DANS LE VESTIAIRE
L’entraîneur du gymnase Empire avait conclu un pacte avec son boxeur avant ce voyage dramatique au Nouveau-Brunswick.
« Ça faisait 26 mois qu’il était sobre et il avait eu un bon camp de 16 semaines, a précisé Duguay. Il était sérieux. Je lui ai dit que je serais dans son coin, mais que ce serait la dernière fois.
Je ne regrette pas d’y avoir été. Avant le combat, on a vécu de beaux moments et on a eu du plaisir avec lui. David était heureux, calme et posé. »
À son arrivée dans son vestiaire du Aitken Centre, Whittom avait rencontré un psychologue sportif qui voulait en savoir plus sur ses motivations qui le poussaient à poursuivre sa carrière. Le boxeur de 39 ans s’est alors livré comme il ne l’avait jamais fait auparavant.
« Il s’est ouvert sur ses problèmes de dépendance, ses relations amoureuses difficiles et sur le fait qu’il ne s’était pas toujours bien occupé de son fils, a raconté Duguay. Il expliquait que le seul endroit où il se sentait bien et vivant, c’était dans un ring de boxe.
Dave n’avait jamais parlé comme cela. Je suis sorti du vestiaire avec mes adjoints Dominique (Côté) et Jean (Lafleur) et on a eu l’impression qu’il nous avait fait son testament. C’est quelque chose dont je vais me souvenir toute ma vie. »
REMISE EN QUESTION
Ébranlé par la situation médicale de Whittom, Duguay avait remis sa carrière d’entraîneur en question à son retour au Québec. Il a même songé à tout abandonner.
« La semaine suivante, il y avait un gala à Robertsonville où j’avais Mike Breton et Kimmy St-Pierre qui devaient y boxer, a expliqué Duguay. J’ai beaucoup hésité, mais j’ai décidé d’y aller pour me replonger dans le bain le plus rapidement possible.
Si je n’y allais pas, j’aurais abandonné la boxe. Ma plus belle paye lors de cette soirée avait été de voir Mike parler avec sa famille après le combat. David, lui, n’aura plus jamais la chance de le faire. »
Il y aura une commémoration en l’honneur de David Whittom au Empire Académie, le 13 avril, à compter de 21 h. Ce sera une soirée de témoignages et d’anecdotes de la carrière du « Sweet Punisher ».