Le Journal de Montreal

D’ESPOIR DU CH À AGENT DE JOUEURS

- ROBY ST-GELAIS

QUÉBEC | Agent de joueurs, avocat et, depuis peu, père de famille. L’ancien hockeyeur et choix de troisième ronde du Canadien Olivier Fortier n’a pas le temps de s’ennuyer depuis qu’il a accroché ses patins à l’issue de la saison 2012-2013. Cette vie trépidante lui a rapidement permis de tourner la page sur un rêve inachevé alors que Fortier baigne plus que jamais dans le milieu du hockey où le développem­ent des joueurs est devenu sa préoccupat­ion quotidienn­e.

À l’été 2013, à peine quelques mois après ses derniers coups de patin dans l’uniforme des Solar Bears d’Orlando, dans la ECHL, le nouveau retraité troquait son chapeau d’athlète pour celui d’agent de joueurs chez Momentum Hockey, une agence dirigée par son agent Christian Daigle.

Fortier n’a que 24 ans à ce moment, mais les nombreuses blessures subies depuis la fin de son stage junior en 2009 avec l’Océanic de Rimouski ont plombé sa progressio­n et la retraite sur la patinoire est l’option privilégié­e après une moitié de saison avec le club-école du Canadien, à Hamilton.

« J’en avais parlé avec Christian durant mes premières années profession­nelles. Par contre, j’espérais que ça n’arrive pas si tôt que ça […] On se disait quelque part dans ma trentaine après avoir fait une carrière dans la Ligue nationale. Ce n’est pas arrivé pour plein de raisons. Mais ce n’était pas un coup de tête de devenir agent, c’était quelque chose qui était réfléchi et mûri », explique le natif de Sainte-Brigitte-de-Laval, aujourd’hui âgé de 28 ans dans une longue entrevue accordée au Journal dans les derniers jours.

Si certains sportifs peinent à meubler leur horaire une fois à la retraite, c’est tout le contraire pour ce choix de troisième tour du Tricolore en 2007 (65e au total), choisi après les Ryan McDonagh, Max Pacioretty et P.K. Subban.

En décembre 2016, il complétait son baccalauré­at en droit à l’Université Laval, et au printemps 2017, il terminait sa formation à l’École du barreau. Il est actuelleme­nt stagiaire pour Fasken Martineau, un important cabinet d’avocats qui a des bureaux à travers le monde. Tout ça en continuant d’apprendre le métier d’agent aux côtés de son mentor et en parcourant le Québec et les Maritimes afin d’aller à la rencontre de ses jeunes clients.

UNE VRAIE PASSION

Fortier est responsabl­e du développem­ent des joueurs chez Momentum Hockey qui représente notamment les attaquants Antoine Roussel (Stars) et Cédric Paquette (Lightning) ainsi que les gardiens Louis Domingue (Lightning) et Christophe­r Gibson (Islanders) dans la LNH. Alexis Lafrenière et Jakob Pelletier, qui ont fait écarquille­r bien des yeux à 16 ans seulement à leur première campagne dans la LHJMQ, font aussi partie de cette écurie. Épuisant, ce rythme de vie ?

« Pour moi, ce n’est pas une corvée d’aller travailler. Ça me passionne de pouvoir aider les jeunes. J’ai vécu exactement les mêmes étapes que mes joueurs, avec les camps de Hockey Québec et Hockey Canada, les combines, les entrevues, les repêchages, etc. Il y a beaucoup de choses que mes joueurs vivent que j’ai vécues il n’y a pas si longtemps et je peux les aider à travers ça.

« Ce qui me passionne, c’est leur développem­ent, et de leur fournir les meilleurs outils possible », assure-t-il. Pourquoi était-il important pour toi de devenir avocat tout en étant agent de joueurs ? « C’est très utile maintenant pour faire le métier d’agent de joueurs. Les équipes de la LNH ont toutes des conseiller­s juridiques qui travaillen­t à temps plein pour elles, soit les dirigeants adjoints sont avocats ou les dirigeants-gérants le sont. Il y a toujours un groupe d’avocats qui négocient, et en tant qu’agence de joueurs, on doit représente­r les droits des joueurs et c’est toujours bien d’avoir ce background-là et d’être respecté par la partie adverse. » A-t-il fallu que vous vous adaptiez au cas d’Alexis Lafrenière, que plusieurs voient déjà comme le premier choix de la séance de sélection de 2020 dans la LNH ? « C’est plaisant de côtoyer un jeune comme ça qui est très talentueux, très motivé et très passionné, en plus d’être voué à un bel avenir. Pour nous, le travail reste semblable. On est là pour son développem­ent, lui offrir les meilleures ressources et le diriger vers les bons endroits. Certes, il y a peut-être des demandes qui sont différente­s des autres joueurs. Il a plus d’attention médiatique, mais pour nous, il n’y a pas vraiment de différence. Puisqu’il est plus exposé médiatique­ment, votre travail est-il encore plus crucial ? « Notre rôle est de s’adapter à chaque joueur et à chaque situation particuliè­re. Alexis, c’est une situation particuliè­re avec l’avenir qu’il a devant lui. Il faut s’ajuster et ça demande du travail différent. Mais chaque joueur demande un travail différent. Certains demandent moins de temps pour plusieurs raisons, d’autres en demandent plus, mais on n’a pas vraiment un cadre fixe et on s’adapte à chaque individu. C’est ce qui fait notre force et notre succès. »

Que réponds-tu à ceux qui jugent que les agents recrutent leurs joueurs trop hâtivement ? « À mon avis, il ne faut pas y aller trop jeune, et ce, pour plein de raisons. Premièreme­nt, notre rapport est plus ou moins important quand le jeune évolue au hockey mineur de bas niveau. Selon nous, il y a un bon

timing pour s’occuper des jeunes afin de bâtir une relation. On est là pour les aider à travers les épreuves qu’ils vont vivre, qu’elles soient positives ou négatives. Et on est là pour les conseiller au moment de prendre les bonnes décisions. » Est-ce une déception de ne pas avoir percé dans la Ligue nationale ? « C’était mon objectif et ce serait mentir de dire que je n’étais pas déçu de mettre fin à ma carrière. On rêve tous de jouer dans la Ligue nationale. Par contre, de la façon dont je vois les choses, je suis quelqu’un qui regarde en avant et qui ne vit jamais dans le regret. Je ne me suis pas morfondu pendant des années. C’est difficile pour tout athlète de prendre sa retraite. Pour moi, le remède a été de plonger dans de nouveaux défis, soit de rentrer à l’université, commencer comme agent et, ce qui a aidé, c’est que je suis resté dans le milieu du hockey. » Tes meilleurs souvenirs profession­nels ? « Les matchs hors concours au Centre Bell devant une salle comble. J’ai vécu la sensation de jouer un match avec le Canadien. C’était une belle expérience. Avec les Bulldogs, j’ai pu jouer sur le premier trio avec de bons joueurs. Je me rappelle un match où j’avais marqué trois buts contre les Marlies de Toronto alors que je jouais sur le même trio que Max Pacioretty et David Desharnais. Et si je ne me trompe pas, quelques jours après, ils étaient rappelés dans la LNH et ils ne sont jamais redescendu­s dans les mineures. »

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PHOTOS ROBY ST-GELAIS ET D’ARCHIVES 1. Olivier Fortier parcourt les arénas du Québec et des Maritimes pour aller à la rencontre de ses jeunes clients. 2. L’ancien choix de 3e ronde du Canadien, photograph­ié lors d’un match des Bulldogs de Hamilton au Centre Bell, en 2011. Le Québécois a...
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