Le Journal de Montreal

Le biathlon dans la mire de l’AMA

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PARIS | (AFP) Après l’athlétisme, le biathlon ? L’Agence mondiale antidopage (AMA) a confirmé hier avoir mené une enquête sur un possible système de corruption au sein de la fédération internatio­nale de biathlon (IBU) afin de cacher des cas de dopage et protéger les intérêts russes.

La division Enquête et investigat­ion (I&I) au sein de l’AMA, créée en 2015, a travaillé sur les activités de l’IBU et « a partagé ses informatio­ns avec les autorités autrichien­ne et norvégienn­e, ainsi qu’Interpol ».

« Ces informatio­ns ont conduit à des enquêtes de la police et ont abouti à des perquisiti­ons en Autriche et en Norvège » mardi, a indiqué l’AMA à l’Agence France-Presse.

« L’AMA confirme que cela est lié au dopage », se refusant à faire plus de commentair­es en raison de l’enquête de police en cours.

Selon un rapport confidenti­el de l’AMA révélé hier par le quotidien français Le Monde, « le but premier de la corruption est de protéger les athlètes russes dopés. La Russie a ciblé avec succès l’IBU et plus spécifique­ment M. (Anders) Besseberg (son président norvégien) et Mme (Nicole) Resch (sa secrétaire générale) », indique l’AMA dans son rapport.

Dans un communiqué publié hier, l’IBU a indiqué prendre le dossier « extrêmemen­t au sérieux ». Nicole Resch a ainsi été suspendue de ses fonctions. Anders Besseberg, par ailleurs membre du conseil de fondation de l’AMA, avait annoncé il y a quelques semaines qu’il ne briguait pas un nouveau mandat à la tête de l’IBU.

LANCEUR D’ALERTE

L’enquête de l’AMA se base notamment sur le témoignage du lanceur d’alerte russe Grigory Rodchenkov, ancien patron du laboratoir­e antidopage russe et qui a révélé un vaste scandale de dopage institutio­nnalisé dans le sport russe entre 2011 et 2015.

Jim Walden, l’avocat de Grigory Rodchenkov, exilé aux États-Unis depuis 2016, a confirmé à l’AFP que son client avait coopéré à l’enquête.

« Nous sommes confiants sur le fait que toutes les fraudes et corruption­s liées au dopage dans le sport internatio­nal seront totalement dévoilées », a déclaré l’avocat.

Pour cacher des cas de dopage de biathlètes russes, l’IBU envoyait les profils suspects à l’Agence antidopage russe (RUSADA) et « s’assurait que les athlètes russes dopés ne puissent pas être repérés », a affirmé Rodchenkov aux enquêteurs de l’AMA, selon Le Monde.

Le profil du biathlète Evgeny Ustyugov, champion olympique de départ de masse à Vancouver en 2010 devant le Français Martin Fourcade, est montré du doigt, car malgré « des valeurs sanguines anormales depuis 2010 », Ustyugov n’a jamais été inquiété par l’IBU, affirme Le Monde.

« Une procédure pour dopage vient d’être ouverte à la demande de l’AMA » contre cet athlète, ajoute le quotidien.

« L’attributio­n initiale des Championna­ts du monde 2021 de biathlon à la Russie » est également l’un des éléments mis en avant par l’AMA pour souligner « l’efficacité de la stratégie » russe pour « faire avancer les intérêts » du pays.

CORRUPTION

En septembre 2016, alors que le scandale de dopage dans le sport est déjà révélé et que la RUSADA est suspendue, l’IBU vote en faveur de Tioumen comme ville hôte des Mondiaux de 2021, qui récolte 25 voix sur les 49 électeurs, soit juste assez pour battre les rivaux slovène et tchèque.

« Selon l’informateu­r anonyme de l’AMA, la Fédération russe avait proposé entre 25 000 et 100 000 euros (39 000 à 156 000 $ CA) à des membres du congrès », affirme le quotidien.

Ce schéma de corruption pour cacher des cas de dopage fait écho à celui mis en place au sein de la fédération internatio­nale d’athlétisme (IAAF), révélé par la chaîne allemande ARD et point de départ des enquêtes lancées par l’AMA et le parquet national financier à Paris en octobre 2015.

Le Sénégalais Lamine Diack, patron de l’athlétisme mondial entre 1999 et 2015, a été mis en examen pour corruption active et passive, son passeport a été confisqué et il ne peut pas quitter la France.

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