Le Journal de Montreal

De l’enthousias­me à la docilité

- Loïc Tassé

Le parcours des libéraux au ministère des Relations internatio­nales et de la Francophon­ie (MRI) est contrasté. Autant Jean Charest aimait les affaires internatio­nales et y était à l’aise, autant Philippe Couillard semble peu les comprendre et s’empêtre dans des déclaratio­ns maladroite­s lorsqu’il séjourne à l’étranger.

Pourtant, les ministres libéraux des 15 dernières années ont été relativeme­nt actifs en relations internatio­nales. Sur les 759 ententes internatio­nales signées par ce ministère depuis sa création il y a 51 ans, 206 l’ont été ces 15 dernières années. Cependant, alors que la société québécoise dans son ensemble tisse de plus en plus de liens de toutes sortes avec l’étranger, le gouverneme­nt du Québec peine à suivre la cadence.

1 Quel est le budget du MRI ?

Le MRI reçoit un budget annuel d’environ 95 millions de dollars. C’est, après le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, le second plus petit budget ministérie­l du gouverneme­nt du Québec. Il compte pour environ 0,12 % de toutes les dépenses du gouverneme­nt. Le MRI ne possède pas l’argent requis pour accomplir correcteme­nt sa mission.

2 Pourquoi le budget est-il si faible ?

L’action internatio­nale du gouverneme­nt du Québec ne doit pas être jaugée uniquement avec ce budget. Tous les ministères prolongent leurs activités au-delà des frontières du Québec. Chacun garde jalousemen­t ses prérogativ­es. Jean-François Lisée, durant son court passage à la tête de ce ministère, avait réussi l’exploit de regrouper sous son autorité les activités diplomatiq­ues et économique­s du Québec à l’étranger. Mais le retour des libéraux au pouvoir en 2014 a été l’occasion de séparer à nouveau les deux missions et donc d’affaiblir à nouveau ce ministère. En plus, beaucoup d’élus estiment que la population ne comprend pas l’importance des relations internatio­nales. Ils ne veulent donc pas trop investir dans le MRI, par crainte de reproches.

3 Quels sont les objectifs du MRI ?

Les relations internatio­nales du Québec, outre la question de l’indépendan­ce, font l’objet d’un assez large consensus entre les partis. Les objectifs que se fixe le gouverneme­nt Couillard en matière internatio­nale sont nobles et généreux : rendre le Québec plus prospère ; contribuer à un monde durable, juste et sécuritair­e ; promouvoir la créativité, la culture, le savoir et la spécificit­é du Québec. Dans les faits, les moyens ne sont pas à la hauteur des ambitions, malgré le dévouement souvent admirable de plusieurs fonctionna­ires et ministres.

4 Comment Ottawa perçoit-il les relations internatio­nales du Québec ?

Du point de vue fédéral, les hauts responsabl­es des relations internatio­nales du Québec ont longtemps été soupçonnés de deux torts : 1) vouloir préparer les dirigeants étrangers à une éventuelle indépendan­ce du Québec et 2) être une bande d’amateurs. Ces deux accusation­s sont injustes, mais pas toujours sans fondement. Elles ont empêché le gouverneme­nt du Québec d’influencer autant qu’il aurait pu les tractation­s internatio­nales d’Ottawa. À ce titre, le sort réservé à la gestion de l’offre des oeufs et du lait dans le cadre des renégociat­ions de l’ALÉNA sera un bon indicateur de l’influence du Québec dans la politique extérieure canadienne.

5 Quelle est l’image du PM en relations internatio­nales ?

Philippe Couillard projette une image de docilité face à la finance et à la promotion du français qui rappelle celle des dirigeants d’avant la Révolution tranquille. Jean Charest ne souffrait pas de cette docilité face aux puissants. Cette image contraste fortement avec une société québécoise de plus en plus présente et gagnante à l’internatio­nal.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada