Le Journal de Montreal

Poursuite d’un million $ pour un ruisseau dévié

Des citoyens craignent de payer pour un chantier illégal dans les Laurentide­s

- ANNE CAROLINE DESPLANQUE­S

Des citoyens de Sainte-Anne-des-Plaines, près de Saint-Jérôme, sont en colère contre leur municipali­té qui fait face à une poursuite de près d’un million de dollars pour avoir illégaleme­nt dévié un ruisseau.

Pour Michel Charron, résident de cette petite ville agricole de moins de 15000 habitants, il est clair que les contribuab­les devront payer la facture à travers leur compte de taxes.

« Pendant qu’on paie des avocats dans ce dossier-là, c’est des services en moins qu’on peut se payer », déplore-t-il.

C’est une Montréalai­se qui poursuit Sainte-Anne-des-Plaines pour 855 000 $. Marilyn Rappaport a hérité de terres agricoles dans la région et attendait un changement de zonage pour vendre, indique la poursuite déposée en Cour supérieure.

Or, en novembre 2016, le ministère de l’Environnem­ent a informé la propriétai­re qu’une partie de ses terres sont désormais inconstruc­tibles, car la Ville y a dévié un ruisseau illégaleme­nt pour construire une route, écrit son avocate Me Christine Duchaine.

PAS DE PERMIS DU MINISTÈRE

Peu avant d’informer la propriétai­re, un inspecteur d’Environnem­ent Québec, Steeve Lachance, s’est rendu sur place.

Dans le rapport qu’il a rédigé et dont Le Journal a obtenu copie, M. Lachance souligne que son ministère n’a émis « aucun certificat d’autorisati­on » avant la réalisatio­n des travaux, « ce qui constitue un manquement » à la loi.

En entrevue au Journal, le maire Guy Charbonnea­u explique avoir fait confiance aux experts de la firme d’ingénierie qui ont réalisé les travaux en lui assurant qu’une autorisati­on du ministère n’était pas nécessaire.

En guise de réprimande, Environnem­ent Québec a émis un avis de non-conformité à la Ville. Mais la propriétai­re du terrain compte bien être dédommagée pour ce qu’elle considère être une « expropriat­ion déguisée », d’après sa requête en justice.

Son avocate calcule qu’elle a perdu 4415 pieds carrés de terrain d’une valeur de 715 000 $, somme à laquelle elle ajoute des dommages punitifs et autres. La Ville tente de négocier avec la plaignante.

Pour M. Charron, les citoyens de Sainte-Anne-des-Plaines sont victimes de la naïveté de leur administra­tion municipale. « Pourquoi nous autres les citoyens devrions payer pour une erreur de la Ville ? » demande-t-il.

ENVIRONNEM­ENT ATTEINT

Il craint aussi que les travaux réalisés sans autorisati­on aient nui à l’écosystème. D’autant plus que des condos ont été construits dans le lit du ruisseau, le long de la route.

Le maire, qui en est à son troisième mandat sans opposition, se défend : « Je suis un grand défenseur de la cause environnem­entale », dit-il.

Dans son rapport, l’inspecteur d’Environnem­ent Québec évalue que les impacts sont mineurs ou modérés, mais recommande un suivi pour s’assurer que « des mesures correctric­es » soient mises en place.

« POURQUOI, NOUS AUTRES, LES CITOYENS, DEVRIONSNO­US PAYER POUR UNE ERREUR DE LA VILLE ? » – Michel Charron, citoyen de Sainte-Anne-des-Plaines

 ?? PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, MARTIN ALARIE ?? Michel Charron, qui habite à Sainte-Anne-des-Plaines, estime que ses concitoyen­s et lui sont victimes de la naïveté de la Ville, qui dit avoir fait confiance à la firme d’ingénierie qui réalisait les travaux. Il montre ici une carte du ruisseau dévié.
PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, MARTIN ALARIE Michel Charron, qui habite à Sainte-Anne-des-Plaines, estime que ses concitoyen­s et lui sont victimes de la naïveté de la Ville, qui dit avoir fait confiance à la firme d’ingénierie qui réalisait les travaux. Il montre ici une carte du ruisseau dévié.

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