Le Journal de Montreal

Le permis d’exportatio­n du Chagall mis en doute

Un expert croit qu’il pourrait y avoir eu des pressions ou de la manipulati­on afin d’accélérer la vente de l’oeuvre

- MICHEL BELLEMARE

Un expert reconnu du milieu de l’art au Canada met sérieuseme­nt en doute la façon dont le dorénavant controvers­é tableau La tour Eiffel de Chagall a obtenu l’autorisati­on de quitter le pays pour être vendu à New York le mois prochain.

« C’est bien évident que quelqu’un a été manipulé, au niveau des vérificati­ons, ou que des pressions ont été faites pour faire ça vite », a déploré Alain Lacoursièr­e, un ancien policier chargé des enquêtes relatives aux oeuvres d’art à la police de Montréal et à la Sûreté du Québec, devenu consultant en oeuvres d’art.

Le tableau, propriété du Musée des beaux-arts du Canada (MBAC) depuis 1956, est actuelleme­nt à l’extérieur du pays pour être montré à des acheteurs potentiels en vue de la vente du printemps de la maison Christie’s, le 15 mai prochain.

Les profits de la vente doivent permettre au musée d’Ottawa de faire l’acquisitio­n d’une oeuvre d’importance pour le Canada.

CONTROVERS­E GRANDISSAN­TE

Concernant la vente du Chagall, des experts, qui comprennen­t mal qu’un tel tableau puisse être vendu par le musée d’Ottawa, demandent à la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, d’intervenir dans ce dossier de plus en plus controvers­é afin de rectifier le tir. Une pétition circule également pour que la vente soit annulée.

La permission demandée par le MBAC pour l’exportatio­n définitive de son Chagall a été traitée et autorisée dans une opération conjointe de Patrimoine canadien et de l’Agence des services frontalier­s, qui relève du ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale.

« En vertu de la Loi [sur l’exportatio­n et l’importatio­n de biens culturels] et des processus établis pour ce faire, il n’est pas du ressort de la ministre du Patrimoine canadien ni du ministre de la Sécurité publique d’intervenir dans une décision relative à une licence d’exportatio­n qui aura été émise en conformité avec la Loi », a mentionné Patrimoine Canada dans un échange de courriels avec l’Agence QMI.

TRAITEMENT INÉDIT

Le gouverneme­nt refuse en outre d’intervenir pour préserver l’indépendan­ce du musée.

Alain Lacoursièr­e est convaincu que la demande du musée aurait dû être refusée par les premières instances étant donné la nature et l’importance du tableau de Chagall, ce qui aurait envoyé le dossier à la Commission canadienne d’examen des exportatio­ns des biens culturels pour révision, un processus qui prend de longs mois.

« Il n’y a jamais eu un autre dossier traité comme ça, d’une oeuvre nationale, jamais », a expliqué en entrevue M. Lacoursièr­e, qui a déjà siégé au sein de la Commission.

 ?? PHOTO COURTOISIE, MUSÉE DES BEAUX-ARTS DU CANADA ?? Le tableau de 1929 La tour Eiffel, de Marc Chagall, propriété du Musée des beaux-arts du Canada depuis 1956, devrait être mis aux enchères par la maison Christie’s en mai.
PHOTO COURTOISIE, MUSÉE DES BEAUX-ARTS DU CANADA Le tableau de 1929 La tour Eiffel, de Marc Chagall, propriété du Musée des beaux-arts du Canada depuis 1956, devrait être mis aux enchères par la maison Christie’s en mai.

Newspapers in French

Newspapers from Canada