Le Journal de Montreal

Les millionnai­res du REM

Huit groupes d’investisse­urs ont misé gros

- HUGO JONCAS

Des promoteurs pourraient faire des centaines de millions avec les plus beaux terrains à proximité des futures gares du train léger de la Caisse de dépôt, entre Montréal et le Dix30.

Notre Bureau d’enquête a identifié huit groupes d’investisse­urs qui ont misé gros sur l’antenne Sud du futur Réseau express métropolit­ain (REM), la première qui sera construite. Sept d’entre eux pourraient avoir la main particuliè­rement heureuse.

Parmi les grands gagnants se trouvent le promoteur Devimco et ses partenaire­s. Ceux-ci ont placé leurs pions dès 2004, pour construire le Dix30 et des tours de condos à Griffintow­n, aux deux extrémités de la ligne Montréal-Brossard.

En 14 ans, ils ont acheté pour 185 M$ de terrains dans ces secteurs, visés depuis des années par des projets de train.

De quoi faire l’envie des promoteurs qui sont arrivés plus tard. « Je les avais regardés ces terrains-là, mais tout le monde trouvait ça trop cher, dit le promoteur Luc Poirier, qui a acquis un plus petit terrain, à moins d’un kilomètre. Eux, ils ont eu le guts de l’acheter. »

L’homme d’affaires n’est toutefois pas en reste dans la ruée vers les lots voisins du REM. Payé 5 M$ en 2016, son terrain du boulevard Lapinière vaut probableme­nt plus du triple aujourd’hui, puisque la banque l’a financé pour 12,5 M$.

LA REDEVANCE FAIT MAL

Le hic : la Caisse et Québec leur imposent une redevance de 10 $ le pied carré, comme sur toute nouvelle constructi­on à moins d’un kilomètre des gares de Brossard.

Pour Luc Poirier et Vincent Chiara, ça représente une facture de plus de 4,7 M$.

Le promoteur Claude Lachance a lui aussi la fameuse redevance en travers de la gorge. Il vient tout juste de débourser plus de 30 M$ pour les derniers terrains disponible­s à L’Îledes-Soeurs, ceux des familles Gewurz et Remer, qui ont acheté toute l’île en 1956.

« Je n’aurais jamais payé ce prix-là sans le REM », dit l’homme d’affaires. Il a un projet de 500 M$ sur ces terrains, mais il doit maintenant intégrer 20 M$ de coûts supplément­aires à cause de la redevance, et il remet ses plans en question.

PROMOTEURS EN COUR

Le mode de financemen­t du REM et les expropriat­ions nécessaire­s pour le projet poussent même certains millionnai­res de l’immobilier à se tourner devant les tribunaux. Ils sont maintenant trois promoteurs à poursuivre la Caisse pour contester la redevance sur les nouvelles constructi­ons.

Les dirigeants des Habitation­s Trigone et Développem­ent Soltron se joignent à un recours entamé en décembre par le consortium Champlain-Brossard. Ils demandent à la Cour supérieure de déclarer inconstitu­tionnels ces frais imposés aux promoteurs.

Selon eux, il s’agit d’une taxe déguisée et illégale. Les plaignants détiennent des terrains à Brossard et à Pointe-Claire, dans le cas de Soltron.

Champlain-Brossard conteste également son expropriat­ion des deux tiers de son terrain pour faire place à la gare terminale du REM, et la décision de Québec d’interdire toute constructi­on immobilièr­e dans le reste de ses lots, qui devront rester agricoles, en principe.

« Ils peuvent faire les plans qu’ils veulent, c’est pas pour autant que je vendrai le terrain ! » assure Denis Epoh, le directeur de l’entreprise, qui était jusqu’en 2013 vice-président d’Ivanhoé-Cambridge, la filiale immobilièr­e de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Les dirigeants qui interdisen­t aujourd’hui le dézonage de son terrain ne seront pas en place éternellem­ent, lance-t-il.

« On sait ce qui se passe dans la vie. Les gens arrivent, ils partent… » – Avec Philippe Langlois

et Andrea Valeria

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PHOTO COURTOISIE CDPQ-INFRA On voit ici un dessin conçu par ordinateur du REM entre L’Île-des-Soeurs et le centre-ville de Montréal.

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