Le Journal de Montreal

Un CH SLD est sommé d’embaucher du personnel

- HUGO DUCHAINE

Pour la première fois, le tribunal d’arbitrage vient d’ordonner à un CHSLD de Montréal d’embaucher l’équivalent de 10 infirmière­s et préposés à temps plein pour offrir des soins adéquats aux résidents.

« C’est une grande victoire [...] C’est une première qui oblige un employeur à créer des postes », lance la vice-présidente de la Fédération interprofe­ssionnelle de la santé du Québec (FIQ), Denyse Joseph.

Dans une sentence arbitrale rendue la semaine dernière, l’avocat Richard Bertrand a tranché que le fardeau de tâches des employés du CHSLD Denis-Benjamin-Viger était trop exigeant pour les employés.

« Le niveau de soins dispensés aux résidents [...] souffrait de carences difficilem­ent acceptable­s », déplore Me Bertrand.

POSTES À CRÉER

Il ordonne à l’établissem­ent de changer les horaires de travail, de créer un poste d’infirmière et un autre d’infirmière auxiliaire. Le CHSLD doit aussi créer quatre postes de préposé aux bénéficiai­res et transforme­r quatre postes de temps partiel à temps plein.

Incapable de s’entendre avec l’employeur, soit le CIUSSS de l’Ouest-de-l’Îlede-Montréal, le syndicat avait déposé une plainte et une personne-ressource a été désignée pour faire enquête. Ses constats sont accablants pour le CHSLD de 125 résidents.

SERVICES DÉFICIENTS

D’abord, la première distributi­on de médicament­s du matin ne se termine que vers 10 h 45, alors que la deuxième devrait commencer à midi. Une situation qui perdure depuis deux ans.

Le personnel semble insuffisan­t pour installer les résidents pour les repas et les aider à s’alimenter. La personne-ressource constate qu’à 14 h 45, sur trois des quatre unités visitées, plusieurs résidents dont le plateau-repas est distribué n’ont pas encore mangé.

Puis, les résidents contraints de porter une culotte d’incontinen­ce ne peuvent pas être changés à temps en raison du manque d’effectifs.

Ils conservent leur culotte souillée toute la nuit et jusqu’après le petit-déjeuner.

Le personnel doit aussi quitter l’établissem­ent bien après la fin de leur quart de travail pour réussir à accomplir ses tâches.

L’arbitre Richard Bertrand souligne que les absences non remplacées ont aussi alourdi le fardeau de tâches des employés.

ABSENCES

Sa décision note qu’entre le 8 janvier et le 16 septembre 2017, il y a eu sur le quart de jour une infirmière non remplacée à environ 57 reprises.

Sur le quart de soir, c’est une vingtaine de fois que le problème s’est répété. Extrêmemen­t fière du jugement, la vice-présidente de la FIQ espère qu’il servira d’exemple. « Ça va avoir un impact énorme. S’il y a des problèmes dans les CHSLD [les syndicats locaux] vont la sortir la décision », dit-elle, ajoutant préférer quand même s’entendre à l’amiable.

« Je trouve ça extraordin­airement intéressan­t [...] il faut répandre ce recours-là partout », plaide le président du Conseil pour la protection des malades, Paul Brunet.

Le CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal n’a pas répondu aux demandes du Journal pour commenter la sentence.

Dans la sentence, une gestionnai­re du CHSLD reconnaît que seulement 77 % des besoins des résidents sont comblés.

« [...] LE PERSONNEL, MÊME EN ROGNANT À L’OCCASION SUR SES PAUSES, SES HEURES DE REPAS, ET EN DEMEURANT EN POSTE AU-DELÀ DE SON HORAIRE N’ARRIVAIT PAS À DISTRIBUER LES MÉDICAMENT­S, À NOURRIR CORRECTEME­NT LES RÉSIDENTS ET N’ÉTAIT PAS EN MESURE DE CHANGER LEUR CULOTTE D’INCONTINEN­CE SOUILLÉE. » – L’arbitre Richard Bertrand

 ?? PHOTO AGENCE QMI, JOËL LEMAY ?? Un arbitre ordonne au CHSLD Denis-Benjamin-Viger, à L’Île-Bizard, d’embaucher une dizaine d’employés supplément­aires pour permettre au personnel d’offrir des soins adéquats à ses 125 résidents. Une première victoire pour la FIQ devant le tribunal...
PHOTO AGENCE QMI, JOËL LEMAY Un arbitre ordonne au CHSLD Denis-Benjamin-Viger, à L’Île-Bizard, d’embaucher une dizaine d’employés supplément­aires pour permettre au personnel d’offrir des soins adéquats à ses 125 résidents. Une première victoire pour la FIQ devant le tribunal...
 ??  ?? DENYSE JOSEPH Vice-présidente FIQ
DENYSE JOSEPH Vice-présidente FIQ

Newspapers in French

Newspapers from Canada