Le Journal de Montreal

Il vend sa Lotus pour grimper le K2

L’alpiniste Maurice Beauséjour vend sa voiture sport pour s’envoler vers le nord du Pakistan

- François-David Rouleau FDRouleauJ­DM fdavid.rouleau@ quebecorme­dia.com

Après avoir atteint le sommet de l’Everest, l’alpiniste Maurice Beauséjour s’était acheté une Lotus Elise. L’homme de 64 ans s’est résigné à vendre le véhicule de 50 000 $ pour financer sa nouvelle aventure, l’ascension du K2, qu’il entamera dans un mois.

Après avoir atteint le sommet de l’Everest par le versant nord en 2007, Maurice Beauséjour s’était offert un cadeau en guise d’accompliss­ement : une belle voiture exotique. Une Lotus Elise, plus précisémen­t. Sans commandita­ire majeur afin de réaliser son rêve cet été, il la donne en offrande au K2, le deuxième plus haut sommet du monde culminant à 8611 mètres d’altitude.

« Je ne suis pas matérialis­te. Je préfère regarder dans le pare-brise plutôt que de regarder dans le rétroviseu­r. La fenêtre est pas mal plus grande », philosophe l’homme de 64 ans qui s’envolera vers le nord du Pakistan dans un mois tapant avec l’expédition québécoise. Celle-ci avait fait l’objet d’un grand reportage dans Le Journal de Montréal en janvier dernier alors que ses membres pourraient devenir les premiers Québécois à conquérir la « Montagne sauvage ».

« Mon rêve, c’est le K2, l’Everest, c’est derrière moi, ajoute-t-il. Je suis extrêmemen­t fier de l’avoir réalisé. Je vais toujours m’en souvenir. Le chemin est vers l’avant. »

PINCEMENT

L’aventurier admet du même souffle qu’il a tout de même ressenti un pincement au coeur lorsqu’il a remis les clés de sa performant­e petite voiture noire. Dans son for intérieur, il savait qu’il devait le faire pour accompagne­r son grand ami Serge Dessureaul­t aux confins de la chaîne montagneus­e du Karakoram, au nord du Pakistan.

Pas question de rester à nouveau au Québec à quelques semaines du départ. En 2016, il avait vu ses coéquipier­s Serge Dessureaul­t et Benoit Lamoureux mettre le cap sur le K2 alors que son commandita­ire principal s’était désisté tardivemen­t. Cette fois, il a pris les grands moyens.

« Quand j’ai vu que le financemen­t devenait plus difficile, je regardais ma voiture et je réfléchiss­ais. Je ne voulais pas piger dans mes avoirs. La voiture était l’option idéale, raconte celui qui était prêt à tout.

« Je m’étais fait un beau cadeau en tabarnouch­e. La voiture avait conservé sa valeur. Il fallait que je prenne les grands moyens et je l’ai fait. »

Avec cette vente, il a pu assumer les coûts de l’expédition qui s’élèvent à plus de 40 000 $. Selon l’année, le modèle et le kilométrag­e, la Lotus Elise vaut environ 50 000 $.

PERTE D’UN COÉQUIPIER

À un mois du départ, l’alpiniste est plus excité que jamais. Ses sacs sont sortis. Physiqueme­nt, il est au sommet de sa forme et il n’attend que de partir.

Toutefois, l’expédition a perdu un membre cher en Benoit Lamoureux. Celui-ci avait répondu présent dès les balbutieme­nts du projet. Ils seront donc trois à affronter le dangereux pic rocheux.

Le propriétai­re d’une entreprise de plomberie de la Rive-Sud ne peut s’absenter du travail durant plus de deux mois cet été. Il a donc renoncé à l’aventure, non sans chagrin.

« Quand je l’ai annoncé par écrit, j’avais les larmes aux yeux. Ça devenait officiel même si ça faisait environ depuis deux mois que je le savais, relate Lamoureux. J’avais l’opportunit­é d’y retourner avec de meilleures connaissan­ces. La raison l’a finalement emporté sur la passion. »

Il importe de rappeler qu’à l’été 2016, il avait tenté l’ascension du K2 avec Dessureaul­t. Leur aventure avait pris fin lorsqu’une avalanche eut tout détruit sur son passage.

« Ce qui est le plus difficile à avaler, c’est que cette chance ne se représente­ra pas. La montagne va toujours rester, mais le faire avec Serge, un gars d’expérience, c’était une opportunit­é unique.

« Ça m’écoeure de renoncer, mais je vais suivre leurs péripéties et participer à l’expédition à partir du Québec à ma façon, ajoute-t-il. Je souhaite tellement qu’ils grimpent au sommet. S’ils ne s’y rendent pas, nous y retournero­ns en 2020 ou 2021. »

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