Les Méganticois ont encore besoin de nous
Dès le lendemain de la tragédie ferroviaire, il y aura cinq ans cet été, on le disait : c’est lorsque les caméras quitteront la ville qu’il faudra se montrer le plus attentif envers nos concitoyennes et concitoyens de Lac-Mégantic.
Et pour cause. Le Journal faisait état hier d’une étude présentée au congrès de l’ACFAS démontrant qu’il y a encore beaucoup de détresse psychologique dans le chef-lieu de la MRC du Granit.
Selon les conclusions de la chercheuse Danielle Maltais de l’UQAC, les jeunes de Mégantic sont deux fois plus nombreux que la moyenne québécoise à entretenir des idées noires. 18 % des enfants du primaire ont déjà envisagé sérieusement de s’automutiler et 15 % ont déjà envisagé le suicide. Chez les jeunes du secondaire, les proportions sont respectivement de 21 % et de 39 %.
On remarque également les mêmes tendances chez les jeunes adultes – les hommes étant les plus affectés – et chez les aînés, qui n’ont pas retrouvé le centre-ville de leurs habitudes et qui sont nombreux à composer avec le stress post-traumatique.
UNE RÉALITÉ BIEN TANGIBLE
En cette Semaine nationale de la santé mentale, il est opportun de constater que quand il est question de difficultés psychologiques, on est souvent porté à penser qu’il s’agit d’un concept bien subjectif, que l’on évoque peut-être de manière un peu trop libérale. Le cas de Lac-Mégantic est pourtant une occasion de nous sensibiliser au fait qu’il s’agit d’une réalité bien tangible pour les gens qui y sont confrontés.
Il suffit de connaître quelqu’un du coin pour savoir à quel point il y a un avant et un après, non seulement pour les personnes qui ont perdu des êtres chers, mais aussi pour ceux qui ont vu un environnement familier être détruit. Il y a une quiétude, une insouciance et une normalité de vivre qui ne reviendront pas.
Partant de là, on se demande bien ce qu’on peut faire, mis à part d’investir les nécessaires ressources de soutien pour venir en aide aux gens. On se doute bien, toutefois, que celles-ci ne ramèneront pas les vies fauchées, non plus qu’elles feront ressortir de terre les bâtiments patrimoniaux détruits.
De même, les Méganticois ont compris très vite que même en condamnant quelques boucs émissaires, les tribunaux ne leur auraient été d’aucune consolation.
POUR UNE VOIE DE CONTOURNEMENT
En toute justice, il y a toutefois quelque chose de bien concret et de très matériel que Lac-Mégantic est en droit de s’attendre. Il s’agit d’arrêter de faire passer en plein centre-ville ce train qui inflige un insolent rappel de la tragédie à chacun de ses coups de sifflet, sur une voie toujours dangereuse, par-dessus le marché.
Le gouvernement Trudeau se traîne les pieds dans le dossier de la voie de contournement. On avait promis une annonce rapide après les élections. Celle-ci se fait toujours attendre.
Par son laxisme en matière d’encadrement de l’activité ferroviaire, le fédéral a une part de responsabilité dans cette affaire. Ce serait la moindre des choses qu’il confirme le plus rapidement possible que les Méganticois fragilisés ne se feront plus narguer par des convois remplis de produits chimiques.
Ça non plus, ça ne ramènera pas les morts. N’empêche que ça empêchera d’en remettre sur les malheurs d’une communauté qui souffre encore beaucoup plus qu’elle ne le mérite.