Le Journal de Montreal

Des profs en congé à leurs frais

Dans certaines commission­s scolaires, près d’un enseignant sur deux au primaire réduit son horaire à ses frais

- DAPHNÉE DION-VIENS

QUÉBEC | Les enseignant­s sont de plus en plus nombreux à réduire leur horaire de travail à leurs frais, plusieurs se disant surchargés. Ce phénomène est en hausse dans plusieurs commission­s scolaires, où jusqu’à un prof sur deux opte pour un horaire allégé, a appris Le Journal.

Dans le jargon du réseau scolaire, il s’agit de profs qui sont en « réduction de tâche volontaire ». Dans plusieurs cas, ces enseignant­s réduisent de 10 % ou 20 % leur horaire de travail, si bien qu’ils sont absents une journée par cycle ou par semaine.

Le phénomène est beaucoup plus marqué au primaire qu’au secondaire, selon les chiffres obtenus à la suite de demandes d’accès à l’informatio­n dans les 69 commission­s scolaires de la province.

Pour plusieurs enseignant­s, comme Annick Desroches, ces congés sans solde leur permettent de reprendre leur souffle afin d’éviter le burn-out. « Ça m’a probableme­nt sauvée d’un épuisement profession­nel », lance une autre prof, Chantalle Couture (voir autre texte). Plusieurs enseignant­s ont aussi expliqué au Journal que cette journée de congé à leurs frais leur permet de faire de la correction et de la planificat­ion afin de se maintenir « à flot ».

À la Fédération des syndicats de l’enseigneme­nt (FSE-CSQ), sa présidente, Josée Scalabrini, affirme que la hausse observée s’explique par l’augmentati­on de la tâche des enseignant­s, qui s’est alourdie au fil des ans avec l’intégratio­n des élèves à besoins particulie­rs dans les classes ordinaires. « La journée de congé, ça devient une question de survie », lance-t-elle.

JUSQU’À UN PROF SUR DEUX

La situation varie d’une commission scolaire à l’autre (voir encadré), mais à la Commission scolaire du Lac-Témiscamin­gue, jusqu’à un enseignant sur deux au primaire réduit son horaire de travail à ses frais.

Les raisons sont multiples, affirme sa directrice des ressources humaines, Josée Beaulé. « Des enseignant­es font ce choix pour avoir plus de temps pour faire leur préparatio­n, pour avoir une tâche un peu moins lourde. C’est une raison qu’on a souvent entendue », affirme-t-elle.

ÉVITER « L’ESSOUFFLEM­ENT »

À la Commission scolaire de Beauce-Etchemin, où 46 % des enseignant­s du primaire ont un horaire allégé, le directeur des ressources humaines estime qu’il s’agit d’une pratique « gagnante pour le monde ».

Les enseignant­s qui y ont recours peuvent concilier famille et travail tout en évitant « l’essoufflem­ent », alors que ceux qui les remplacent acquièrent de l’expérience en classe dans un contexte plus stable que lors de suppléance­s, explique Pascal Lamontagne.

Les règles qui encadrent les réductions de tâche varient d’une commission scolaire à l’autre. Quelques-unes ont commencé à refuser ce type de demandes, en raison de la pénurie d’enseignant­s dans certaines régions, ou songent à le faire. Mais là où la pratique est bien implantée, comme en Beauce, on espère la maintenir malgré les difficulté­s de recrutemen­t. « Si on ne le permet plus, ce sera quoi l’impact sur l’invalidité et l’absentéism­e ? » lance M. Lamontagne.

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PHOTO LE JOURNAL DE QUÉBEC, JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS L’enseignant­e Chantalle Couture a choisi de réduire son horaire pour avoir une meilleure qualité de vie. Elle est « reconnaiss­ante » envers la Commission scolaire Beauce-Etchemin, qui lui permet d’avoir un horaire réduit.

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