Le Journal de Montreal

Un « choix de vie » bénéfique pour ses élèves

- DAPHNÉE DION-VIENS

QUÉBEC | « Avant, j’arrivais à l’école la langue à terre, j’avais toujours l’impression de courir après mon temps. Maintenant, je suis plus patiente avec mes élèves, je suis tout le temps contente de venir travailler. »

Après avoir passé de nombreux soirs et fins de semaine à faire de la préparatio­n de classe, l’enseignant­e Chantalle Couture a décidé il y a déjà plusieurs années de s’offrir une journée de congé par semaine.

« Il y a certaines années, j’ai eu des compositio­ns de classe assez “rock and roll”. J’avais des enfants avec des troubles de comporteme­nt, des troubles du spectre de l’autisme, le syndrome de Gilles de la Tourette… Je suis sûre que ma journée de congé m’a permis d’éviter un épuisement profession­nel. »

Même son de cloche de la part d’An- nick Desroches, qui enseigne depuis plus de dix ans à des élèves qui ont des difficulté­s graves d’apprentiss­age, dans une école primaire de la Montérégie. Même si elle a choisi de travailler auprès de cette clientèle, l’énergie n’y est plus, raconte-t-elle. Il y a deux ans, elle a réduit sa tâche – et son salaire – de 10 % pour ne pas y laisser sa peau.

« Au début, on sort de l’université, on est plein de bonnes intentions, on fait plein de projets. Au fil du temps, la fatigue s’installe. C’est sournois et ça nous effrite. Je revenais de travailler et je n’étais même pas capable de faire à souper. J’ai une fille, j’avais de la misère à m’occuper d’elle. Dans mon cas à moi, ce n’est pas une journée de congé pour faire de la correction, c’est une journée de convalesce­nce. Et si je pouvais me le permettre financière­ment, je prendrais jusqu’à une journée par semaine, à mes frais. »

Selon Mme Desroches, la profession d’enseignant est de plus en plus difficile.

« Les parents sont de plus en plus exigeants, ils nous demandent des comptes à rendre, on a des tâches de secrétaria­t qui nous sont rajoutées… Et à notre école, il n’y a pas de stabilité de personnel, il y a un gros roulement. Chaque année, c’est toujours à recommence­r. »

PLANIFICAT­ION ET CORRECTION

Une autre enseignant­e, qui a refusé d’être identifiée, raconte qu’elle passe sa journée de « congé » hebdomadai­re à faire la correction et la planificat­ion qu’elle n’a pas le temps de faire au quotidien, parce qu’il faut répondre aux nombreux courriels de parents ou rencontrer une intervenan­te parce qu’un élève s’est désorganis­é. « La journée de congé, c’est pour avoir une qualité de vie, avec notre famille, sinon, on n’arrive pas. C’est juste trop. »

Newspapers in French

Newspapers from Canada