Le Journal de Montreal

Six ans de prison à l’ancien avocat trafiquant de drogue

Le Montréalai­s refilait des stupéfiant­s à des clients en plein palais de justice

- ERIC THIBAULT En prison, le gramme de haschisch s’élève à 200 $ ; 1 g de cannabis se vend 100 $ ; il en coûte 50 $ pour une dose de méthamphét­amine, et un timbre de fentanyl vaut 400 $.

Un ex-avocat montréalai­s trouvé coupable d’avoir remis du fentanyl et plus de 30 000 $ de drogue à un détenu au palais de justice de Sorel-Tracy s’est vu infliger six ans de pénitencie­r, hier.

Menotté dans le box des accusés, Luc Vaillancou­rt a écouté sans broncher le juge Jean-Pierre Dumais le qualifier de « disgrâce » pour son ancienne profession, tout en déplorant son « comporteme­nt inacceptab­le » et dénué de remords.

Vaillancou­rt, qui a démissionn­é du barreau après son arrestatio­n, en 2013, est déjà incarcéré depuis le 9 mars, date où il a été déclaré coupable de complot et de trafic de stupéfiant­s au terme de son procès.

Entre avril et septembre 2013, l’ex-criminalis­te de 49 ans a voulu arrondir ses fins de mois en servant d’intermédia­ire pour des détenus de la prison de Sorel-Tracy qui trempaient dans un réseau de contreband­e.

Ses complices, qui le surnommaie­nt « La Cravate », le payaient entre 500 $ et 1000 $ chaque fois qu’il les approvisio­nnait, d’après la preuve amassée par la Sûreté du Québec.

Le magistrat a insisté sur les quatre timbres de fentanyl — cet opiacé 100 fois plus puissant que la morphine et à l’origine de six surdoses mortelles à Montréal en 2017 — trouvés parmi les stupéfiant­s que Vaillancou­rt a remis à un client qui comparaiss­ait au palais de justice de Sorel-Tracy, le 20 septembre 2013.

Le fentanyl est devenu « un fléau » en prison, où les détenus qui réussissen­t à s’en procurer risquent leur vie en se découpant des doses « de façon aléatoire » qu’ils vont avaler, fumer où s’injecter dans les veines, a déploré le juge Dumais.

SA FEMME COMPLICE

L’avocat déchu et Jean-François Raymond ont été filmés lors de leur transactio­n au « parloir » du palais de justice. La drogue — 144 g de haschisch, 21 comprimés de speed et 19 g de pot — en possession de ce détenu a rapidement été saisie.

Les policiers avaient découvert qu’après avoir reçu les commandes de Raymond au téléphone, sa conjointe préparait les stupéfiant­s — dans des « plugs » avec du lubrifiant pour que Raymond puisse les insérer dans son rectum — et les apportait à Me Vaillancou­rt au palais de justice quand son chum devait comparaîtr­e.

Depuis que Vaillancou­rt et son client ont été pris en flagrant délit, les avocats et détenus qui doivent se rencontrer en privé pour discuter de leurs dossiers dans les palais de justice du Québec doivent d’abord se soumettre à une fouille, a témoigné un responsabl­e du ministère de la Sécurité publique au procès.

10 FOIS PLUS CHER

Le juge s’est rendu à la suggestion de la procureure de la poursuite, Me Geneviève Beaudin, qui réclamait une peine de six ans. Vaillancou­rt a déjà porté sa cause devant la Cour d’appel.

Au procès, une spécialist­e de la SQ a déclaré que le prix de la drogue vendue dans la rue est multiplié par 10 lorsqu’elle est écoulée en milieu carcéral.

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PHOTO D’ARCHIVES L’avocat Luc Vaillancou­rt au moment de sa comparutio­n au palais de justice de Sorel-Tracy en octobre 2013.

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