Le Journal de Montreal

Un vaccin contre la maladie de Lyme est mis au rancart

Approuvé en 1998, il a été retiré du marché en 2002 sous le feu des critiques

- ANNE CAROLINE DESPLANQUE­S

Un vaccin efficace contre la maladie de Lyme a été retiré du marché il y a 16 ans, dénoncent des spécialist­es qui réclament son retour.

« S’il était encore vendu, je le prendrais et je le recommande­rais aux membres de ma famille », indique Tara Moriarty, directrice scientifiq­ue du Réseau canadien sur la maladie de Lyme et chercheuse à l’Université de Toronto.

« On a besoin d’un vaccin », plaide le Dr Brian Ward, codirecteu­r du Centre d’études sur les vaccins du Centre universita­ire de santé McGill (CUSM).

Celui-ci était membre du comité-conseil sur LYMErix au Québec dans les années 1990. Ce vaccin, développé par la pharmaceut­ique Smithkline Beecham, devenue GlaxoSmith­Kline, a été approuvé aux États-Unis en 1998.

Efficace à 76 %, soit plus que le vaccin contre la grippe, il a pourtant été retiré du marché par le fabricant en 2002.

Seize ans plus tard, dans un rapport publié le mois dernier, la Commission de la Santé et des Services sociaux du Québec disait souhaiter qu’un vaccin soit créé, sachant qu’il en existe un pour les animaux.

La pharmaceut­ique franco-suisse Valneva teste actuelleme­nt un vaccin qui pourrait être commercial­isé d’ici cinq ans.

PROGRESSIO­N

Mais en attendant, la maladie progresse à vitesse grand V. De fait, la commission parlementa­ire a appelé Québec à faire plus pour comprendre, diagnostiq­uer et traiter la maladie. « Plus d’études sont nécessaire­s », indique le rapport.

Ottawa a justement débloqué une enveloppe de 4 millions $ dédiée à la recherche sur la maladie, l’année passée. Un an après l’annonce, les fonds n’ont cependant pas encore été distribués.

Dans l’intervalle, un conflit a éclaté entre la Fondation canadienne de la maladie de Lyme (CanLyme) qui représente des patients et une partie des chercheurs, dont la Dre Moriarty.

L’organisati­on a décidé de boycotter l’équipe de la chercheuse de l’Université de Toronto, contre laquelle elle multiplie les attaques sur les réseaux sociaux. Elle lui reproche notamment d’avoir exclu les patients du processus de recherche.

EFFETS SECONDAIRE­S

C’est un mouvement semblable qui a mené au retrait du vaccin aux États-Unis, en 2002. La couverture médiatique négative et un recours collectif contre le fabricant ont plombé les ventes, poussant la pharmaceut­ique à stopper la production.

Or, « il n’y avait aucune donnée qui démontrait que ce vaccin pouvait causer du tort », insiste le Dr Ward.

Des 1,4 million d’Américains qui ont reçu le vaccin dès les 18 premiers mois de sa commercial­isation, 905 se sont plaints d’effets secondaire­s pour la plupart légers, principale­ment de la douleur au point d’injection, indiquent deux chercheurs de l’Université Harvard dans la revue Epidemiolo­gy and Infection.

« Les effets secondaire­s n’étaient pas plus nombreux ou plus graves que pour la moyenne des vaccins », souligne la Dre Moriarty.

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