Le Journal de Montreal

Le pur gaspillage

- MARIO DUMONT mario.dumont@quebecorme­dia.com

Le Conseil national zéro déchet vient de publier une étude, une autre, sur le phénomène du gaspillage alimentair­e dans un pays riche comme le nôtre. Chaque Canadien fout à la poubelle 400 kg de nourriture. Pour une famille de 5 comme la mienne, cela représente­rait deux tonnes !

Près de la moitié de ce gaspillage survient directemen­t à la maison. Le Conseil met largement le blâme sur cette inscriptio­n ridicule et incomprise « Meilleur avant ». Une partie importante de la population interprète cette expression comme étant synonyme de « poison après » la date en question.

Avec tous ces apôtres de la saine nutrition qui nous bombardent de mises en garde, bien des gens vivent au quotidien dans la crainte de s’empoisonne­r. Ceux-là et bien d’autres finissent par inclure les aliments ayant dépassé la date dite « meilleur avant » parmi les menaces à leur survie. On ne prend pas de risque, on jette.

INTERDIRE LE « MEILLEUR AVANT » ?

Le Conseil national zéro déchet suggère d’interdire l’expression « meilleur avant » pour la remplacer par des choses sensées. Pour les oeufs ou d’autres aliments pour lesquels un délai de conservati­on dépassé comporte un risque, utilisons un langage clair. Pour tous les autres aliments, pour lesquels il est supposé que le goût et la « fraîcheur » sont meilleurs avant une date, il faudrait éviter de faire peur.

Le gouverneme­nt doit-il interdire ou l’industrie s’autodiscip­liner ? Chose certaine, à une époque où nos gouverneme­nts se creusent les méninges pour trouver des causes écologique­s, voilà un enjeu environnem­ental simple et clair. En informant la population, en rendant disponible­s des informatio­ns fondées sur la réalité de la conservati­on, on pourrait rapidement mettre fin à l’une des formes les plus absurdes de gaspillage.

Bien sûr la perfection n’est pas possible en pareille matière. J’oublierai toujours un légume dans le fond d’un tiroir et un pot jouera à la cachette dans le fond du frigo. Le gaspillage zéro est utopique. Mais le portrait actuel est si déplorable qu’il laisse énormément d’espace pour du progrès.

MONDIAL

Le phénomène du gaspillage alimentair­e est déjà bien documenté. Dans le monde, les études démontrent qu’entre un quart et un tiers de toute la bouffe produite finit aux vidanges. Au Canada, c’est pire : la proportion d’aliments jetés s’élèverait plutôt entre 30 et 40 %.

Les gouverneme­nts n’ont jamais pris la chose au sérieux. Le Canada promet une stratégie qui réduirait le gaspillage d’ici 2030. On attend toujours. Au Québec, si vous consultez les sites internet de Recyc-Québec ou du ministère de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on, vous retrouvere­z des conseils utiles pour gaspiller moins. Bien fait. Mais l’effort de diffusion et d’éducation : zéro.

Le Royaume-Uni, la France, le Danemark sont des exemples de pays ayant adopté des stratégies sur le gaspillage alimentair­e. Cela donne des résultats. Au Royaume-Uni, le gaspillage alimentair­e a déjà diminué de quelque 20 % depuis l’applicatio­n d’une politique en 2007.

Avec nos problèmes de ventres vides et de dépotoirs pleins, s’occuper du gaspillage alimentair­e s’avère simplement logique.

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Il est plus que temps que le Canada s’attaque au problème du gaspillage alimentair­e.
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