Le Journal de Montreal

VOYEURISME SUR DES CAMPUS UNIVERSITA­IRES

De nombreux cas d’indécence, voire des agressions, ont lieu dans les résidences

- DOMINIQUE SCALI

Des hommes qui se promènent dans les douches des dames pour les épier, un intrus qui se masturbe devant tout le monde. Les incidents de voyeurisme et d’exhibition­nisme sont récurrents sur plusieurs campus universita­ires montréalai­s.

« Une résidente s’est fait filmer par un inconnu alors qu’elle prenait sa douche » en avril 2018, peut-on lire dans un document transmis par l’Université de Montréal (UdeM).

Ce n’est pas le premier incident du genre à survenir dans les résidences de l’UdeM. Selon les données obtenues par Le Journal, des cas semblables ont eu lieu en 2017, 2014 et 2010.

À McGill, où plusieurs résidences se trouvent au centre-ville, le nombre d’incidents est encore plus élevé. En 2016-2017, pas moins de 18 cas de voyeurisme ou d’exhibition­nisme ont été répertorié­s, un sommet jamais atteint au cours des six dernières années.

« Les étudiants se faisaient simplement répondre : ‘‘appelez le 911’’. […] Ce n’est clairement pas la priorité des responsabl­es d’améliorer la sécurité », critique Katia Innes, une des représenta­ntes du conseil des résidents.

Un homme se serait notamment masturbé à plusieurs reprises à la vue des résidents du Royal Victoria College (les résidences de McGill), dans la cour intérieure qui donne sur la cafétéria.

« Je ne sais pas le nombre exact, mais il a été vu au moins quatre fois », explique Claire Williams, vice-présidente aux communicat­ions du comité des résidents de McGill.

« APATHIE »

L’associatio­n étudiante de McGill dénonçait en avril la façon dont sont gérés les cas de violences sexuelles par l’administra­tion.

« Il y a une véritable apathie sur cette question », abonde Sean (nom fictif), un ancien représenta­nt de résidents.

« Je me suis senti impuissant », raconte celui qui dit avoir aidé une étudiante ayant été agressée sexuelleme­nt dans sa résidence. Selon lui, les responsabl­es à McGill n’ont pas mis les efforts suffisants pour retrouver l’agresseur ni offert un soutien convenable à la victime. Il préfère taire son vrai nom pour ne pas identifier la victime par ricochet.

À l’UdeM, Vivianne (nom fictif) croit aussi que la sécurité pourrait être renforcée. Aujourd’hui diplômée, elle a été représenta­nte de résidents jusqu’en 2016.

RÔDEUR

Elle préfère taire son nom pour ne pas nuire à sa réputation sur le marché du travail, les étudiants-employés des résidences étant tenus au silence. Le comité de vie en résidence de l’UdeM a d’ailleurs refusé de répondre à nos questions pour cette raison.

Vivianne se souvient d’un rôdeur qui s’immisçait dans les chambres des résidentes pour tenter de leur faire des attoucheme­nts. Ce scénario rappelle celui qui s’est produit en 2016 à l’Université Laval, où Thierno-Oury Barry est entré dans des chambres d’étudiantes pour les agresser.

« Il s’agit de jeunes filles qui partent souvent de chez elles pour la première fois […] Elles essaient de trouver un peu de chez elle là-bas, et un événement comme celui-là peut briser leur équilibre émotionnel déjà fragile », déplore Vivianne.

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