L’UE se dote d’un fonds de défense pour s’affranchir des États-Unis
L’initiative ne manquera sans doute pas d’attiser la colère de Donald Trump
BRUXELLES | (AFP) L’Union européenne (UE) doit présenter aujourd’hui le premier Fonds européen de défense (FED), pour développer les capacités militaires des États membres, mais les conditions d’éligibilité vont écarter les firmes des pays tiers, américaines et britanniques notamment, ont indiqué des responsables européens.
Dotée de 13 milliards d’euros (près de 20 G$), l’initiative, qui vise à promouvoir l’autonomie stratégique de l’UE, risque de tendre encore plus les relations avec Donald Trump à un mois d’un important sommet de l’OTAN à Bruxelles.
Pour être éligibles, « les entreprises devront être basées dans l’Union européenne, avoir leurs infrastructures dans l’Union européenne et surtout, les prises de décisions ne pourront pas être contrôlées par une entité installée hors de l’Union européenne », explique un responsable européen sous couvert de l’anonymat.
En clair, la filiale européenne d’un groupe américain, canadien, russe ou chinois ne pourra pas prétendre aux financements du FED.
Ces conditions s’imposeront également au Royaume-Uni, a précisé un autre responsable européen : « Le programme commencera à s’appliquer à partir du 1er janvier 2021 et donc pour une Union européenne à 27 membres. » À cette date, le Royaume-Uni aura quitté l’UE en raison du Brexit.
MISE EN GARDE AMÉRICAINE
Les États-Unis ont déjà mis en garde leurs alliés européens contre toute discrimination affectant leurs entreprises.
« Ces critères ne sont pas discriminatoires. Il s’agit de réciprocité. Pour bénéficier de financements américains, les firmes doivent être basées aux États-Unis, employer exclusivement du personnel américain et aucune information ne peut remonter à la maison mère si elle n’est pas basée aux États-Unis », fait-on valoir à Bruxelles. « Les critères d’éligibilité européens sont similaires. Il est normal que l’argent européen aille aux firmes européennes », insiste un responsable européen.
Même le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, l’a reconnu. « Les pays de l’OTAN non membres de l’UE ne peuvent pas prétendre aux financements européens », a-t-il déclaré lors de la réunion des ministres de la Défense de l’Alliance le 7 juin à Bruxelles.
INSTRUMENT D’ÉMANCIPATION
Le Fonds européen de défense est « un instrument d’émancipation » pour l’Union, totalement dépendante aujourd’hui des entreprises américaines pour la fabrication de drones militaires et la protection de ses satellites, soutiennent les responsables à Bruxelles.
Pour la Commission européenne, « le Fonds contribuera à l’autonomie stratégique de l’Europe en matière de protection et de défense de ses citoyens ».