Le Journal de Montreal

De la radicalité

- CLAUDE VILLENEUVE claude.villeneuve @quebecorme­dia.com @vclaude

Au moment d’aborder n’importe quel débat public, on devrait toujours privilégie­r la posture de la curiosité, plutôt que celle de la certitude. Sans quoi, on n’est plus dans la réflexion, on est dans la foi. On n’est plus dans la défense de ses valeurs, mais dans la volonté de les imposer.

On trouve sur Radio-Canada.ca une série de balados intitulée « Radical ». L’excellente journalist­e Marie-Eve Tremblay nous y présente des personnes qui ont décroché d’une cause qu’ils avaient défendue corps et âme.

On découvre le cheminemen­t d’une ex-naturothér­apeute qui croyait que tout se soignait avec des jus verts ; d’une ancienne des Témoins de Jéhovah qui avait peur des transfusio­ns ; d’un citoyen souverain qui pensait pouvoir se soustraire à l’impôt.

Plus intéressan­t encore, on entend les témoignage­s de deux personnes qui se sont déradicali­sé de courants qui sont quand même assez répandus. D’une part, un homme qui a défendu passionném­ent le droit de diffamer des radios privées, jusqu’à ce qu’il en fasse luimême les frais. D’autre part, une femme qui s’est engagée intensémen­t dans le conflit étudiant de 2012, jusqu’à s’épuiser d’être toujours en colère et de vivre l’intimidati­on des réseaux militants.

PRISONS MENTALES

Les idées, quand elles deviennent des certitudes absolues, peuvent être des prisons mentales, au même titre que les religions. À droite comme à gauche, la radicalité s’accommode mal du dialogue et contribue rarement au progrès.

Le débat du moment en est une bonne illustrati­on, avec tous ces propos stridents sur le spectacle SLAV, présenté au TNM.

D’un côté, des gens qui pensent qu’il n’y a aucun intérêt à écouter ceux qui dénoncent l’appropriat­ion culturelle. De l’autre, des personnes qui pensent que c’est intelligen­t de traiter de raciste quelqu’un d’assez ouvert d’esprit pour aller voir un spectacle sur les chants d’esclaves. Tout ce beau monde qui se traite mutuelleme­nt de fascistes ou de nazis.

Comment voulez-vous que quelque chose d’intelligen­t surgisse de ça ? La démocratie, ce n’est pas souhaiter que notre point de vue triomphe en discrédita­nt ceux qui ne pensent pas comme nous. C’est penser que nos idées s’implantero­nt durablemen­t en donnant le goût aux gens de se les approprier.

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